(27) "L'immobilité est le fondement de la transformation physique - non pas une immobilité extérieure, mais intérieure, dans la conscience cellulaire.”

Si le silence est la condition de base de la transformation mentale, si la paix est la condition de base de la transformation vitale, l'immobilité est le fondement de la transformation physique - non  pas une immobilité extérieure, mais intérieure, dans la conscience cellulaire. Dans le silence mental et dans la paix vitale, nous avons démêlé les innombrables vibrations du monde, les influences secrètes qui nous font agir, sentir, penser; dans l'immobilité de la conscience physique, de même, nous commençons à démêler un étrange pullulement de vibrations et à voir de quel grain nous sommes faits. Cellulairement, nous vivons dans un chaos complet; c'est un maelström de sensations, fortes, agréables, douloureuses, aiguës, des pointes en haut, des flèches en bas, et, dès que le tourbillon s’arrête, c’est comme un trou d’angoisse qu’il faut combler à tout prix par d’autres sensations et toujours plus de sensations. On ne se sent vivre que quand on bouge. La base du travail est donc d’amener une immobilité complète dans ce chaos – pas une égalité d’âme, mais une égalité de cellules. Alors le travail de vérité peut commencer. Dans cette égalité cellulaire, notre corps sera comme une vasque transparente où les moindres vibrations deviendront perceptibles, donc saisissables, donc maîtrisables; toutes les forces de maladie, de désintégration, de mensonge, toutes les déformations et les difformités subconscientes, et leur horrible petite faune, se mettront à grouiller visiblement dans cette clarté, et nous pourrons les pincer. L’effervescence d’Agni, en définitive, ne tient pas tant à une impossibilité d’adaptation cellulaire, qu’à une résistance de “nos” obscurités. Seule cette immobilité purifiante peut dégager le terrain et libérer le Mouvement foudroyant d’Agni sans que le corps se mette à vibrer à l’unisson, s’affole et entre dans des températures inconsidérées.
Une fois cette immobilité cellulaire relativement établie, nous ferons une première découverte; nous nous heurterons à un obstacle majeur, qui est une aide majeure dans le travail de transformation, car toujours, sur tous les plans, l’opposition est exactement adaptée à la force qu’il faut pour faire un pas en avant; c’est le poids mort et le levier. Déjà nous avions reconnu sous notre mental pensant un “mental vital” qui trouve des justifications merveilleuses à tous nos désirs, toutes nos impulsions, puis un “mental physique” qui répète et répète mille fois les mêmes incidents comme une scie. Mais il y a une couche plus profonde encore, un tuf mental si l’on ose dire, que Sri Aurobindo appelle le
mental cellulaire. C’est vraiment un mental des cellules, ou de groupes de cellules, qui ressemble beaucoup au mental physique par son inépuisable capacité de répéter la même rengaine, mais qui ne se limite pas à la région cérébrale ni à la trituration mécanique des bribes de pensée; il est partout dans le corps, comme des millions de petites voix, que l’on a vite fait d’entendre quand les autres couches mentales se sont clarifiées, et il remue infatigablement, non plus des déchets d’activités conscientes, mais toutes nos impressions sensorielles : il suffit qu’une fois un groupe de cellules ait été touché par une impression, une peur, un choc, une maladie, pour qu’elles reproduisent indéfiniment leur peur, leur raidissement, leur tendance à la désorganisation ou le souvenir de leur maladie. C’est un mental grégaire, absurde, qui gagne de proche en proche et vibre, vibre partout, sans fin; qui accroche toujours les mêmes longueurs d’onde, les mêmes suggestions décomposantes et réagit imperturbablement aux mêmes excitations comme le chien de Pavlov au coup de sonnette. C’est la peur de vivre engrenée dans la Matière. Et naturellement le petit bout d’initiative dont il dispose sert à appeler tous les désordres, par crainte, et l’inconscience de la mort comme un repos. Mais ce mental cellulaire, qui est d’une puissance assez formidable si l’on y songe bien, comme les fourmis sur l’éléphant, peut mettre son absurde mécanique au service de la vérité comme du mensonge; si une seule fois on lui fait accrocher une vibration de lumière, il la répétera avec l’entêtement d’une mule, et, chose remarquable, il la répétera jour et nuit, sans arrêt.* Quoi que l’on fasse extérieurement, travail, discussion, sommeil, il sassera et ressassera  sa vibration, automatiquement, d’une façon tout à fait indépendante. On comprend donc son importance considérable pour la transformation; il peut être un singulier fixateur de la vibration supramentale. Voici ce qu’en dit Sri Aurobindo: ... Il y a aussi un mental obscur, un mental du corps, des cellules mêmes, des molécules, des corpuscules. Haeckel, le matérialiste allemand, a parlé quelque part d’une volonté dans l’atome, et la science récente, en présence des imprévisibles variations individuelles de l’électron, est sur le point de s’apercevoir que ce n’est pas une métaphore, mais l’ombre portée d’une réalité secrète. Ce mental corporel est très tangiblement réel; par son obscurité, son attachement obstiné et mécanique aux mouvements passés, sa facilité à oublier, son refus du nouveau, il est l’un des obstacles principaux à l’infusion de la Force supramentale dans le corps et à la transformation du fonctionnement corporel. Par contre, une fois effectivement converti, ce sera l’un des instruments les plus précieux pour stabiliser la Lumière et la Force supramentale dans la Nature matérielle.
Que dire de ce travail? il est infinitésimal. Et la seule façon de le faire n’est pas d’entrer en des méditations profondes, qui ne touchent que le sommet de notre être, pas de réussir des concentrations ou des extases extraordinaires, mais d’être en plein dedans, de travailler au niveau du corps, tout en bas, à chaque minute du jour et de la nuit. C’est pourquoi Sri Aurobindo insistait tant sur la nécessité du travail extérieur et des exercices physiques les plus ordinaires, parce que c’est la seule façon de se mesurer avec la matière et de pousser dedans un peu de conscience vraie ou, plutôt, de permettre à Agni d’émerger librement. C’est pour cela qu’il marchait tant d’heures chaque jour et travaillait toutes ces heures de la nuit. Au milieu de ce travail extérieur et grâce à lui, le chercheur verra émerger toutes les vibrations fausses, tous les faux plis du corps, comme dit la Mère. Et chaque vibration fausse devra être rectifiée. Mais c’est encore une façon négative de dire les choses. En vérité, il n’y a qu’une seule grande Vibration de joie divine dans le monde – la Vibration – car Dieu est Joie; dès que la fausseté s’introduit, cette même vibration se décolore, elle se durcit, se tend – tout grince. La souffrance est le plus sûr indice de la fausseté. La douleur est le Mensonge du monde. Tout le travail du chercheur n’est donc pas tant de lutter contre des vibrations dites mauvaises, que de garder la vraie vibration, la joie divine dans le corps, qui, elle, a le pouvoir de remettre en ordre, détendre, harmoniser, guérir toutes ces petites vibrations serrées, usantes, mensongères, dans lesquelles nos cellules vivent constamment. Il serait fastidieux, aussi fastidieux que le travail lui-même, de décrire les innombrables petites faussetés du corps par où s’introduisent le vieillissement, les maladies et la mort. Faire chaque chose de la vraie manière, dit la Mère, et il y a d’innombrables manières fausses de faire les moindres gestes quotidiens. À titre d’exemple, nous ne soulignerons ici qu’un point de travail parmi bien d’autres : nous faisons tout dans la tension, la précipitation, n’importe comment, inconsciemment; devant les mille et une sollicitations de la vie extérieure, sans parler des chocs, nous nous comportons physiquement comme le patient dans le fauteuil du dentiste; tout est crispé, recroquevillé, par hâte, par peur, par anxiété, par avidité – c’est l’héritage de quelques millions d’années d’animalité; notre substance se souvient d’avoir lutté pour survivre, elle est tout le temps à se durcir. Ce durcissement est l’une des causes de la mort et un grand obstacle à l’établissement de la vibration vraie. Quand nous nous durcissons sous un choc, nous ramassons toute notre force vitale en un point, comme une défense; brusquement, un énorme courant passe par un orifice minuscule, qui tourne au rouge et fait mal. Si nous apprenions à élargir notre conscience physique et à absorber le choc, au lieu de le rejeter, nous ne souffririons pas - toute souffrance est une étroitesse de conscience, à tous les niveaux. Mais on comprend que si, d’un seul coup, se précipitait dans les cellules ce poudroiement d’or chaud supramental et que le corps réagisse par son durcissement habituel, tout éclaterait. C’est-à-dire que notre conscience cellulaire, comme notre conscience mentale et vitale, doit apprendre à s’élargir et à s’universaliser. Il faut que là aussi la conscience cosmique s’introduise. Dans le silence mental, la conscience mentale s’universalise, dans la paix vitale, la conscience vitale s’universalise; dans l’immobilité du corps, la conscience physique s’universalise. Immobilité, réceptivité, élargissement cellulaire, sembleraient parmi les conditions de base pour que la substance puisse supporter Agni et durer. 
(...)
C’est partout qu’il faut vaincre, pour tous les corps et pour la terre entière. On ne peut rien transformer si l’on ne transforme tout. Sinon, on est tout seul dans son trou de lumière. Et à quoi cela sert? À quoi sert qu’un seul homme soit transformé, si le reste meurt et meurt? Le corps du pionnier de la transformation est donc comme un champ de bataille, et c’est la bataille de tout le monde qui s’y livre; tout s’y rencontre, tout y résiste. Il y a un
point central tout en bas, un nœud de vie et de mort, où se joue le destin du monde. Tout est ramassé en un point.

   
 J’ai creusé longtemps, profond
    Dans la fange et la boue
    Un lit pour la chanson d’une rivière d’or,
    Une demeure pour un feu qui ne meurt pas...
    Mes plaies sont mille et une...

Et il doit faire face à toutes les difficultés, même à la Mort, non pour les détruire, mais pour les changer. On ne peut rien transformer sans prendre sur soi :
Tu porteras toutes choses pour que toutes choses puissent changer, dit Savitri; c’est pourquoi Sri Aurobindo a quitté son corps le 5 décembre 1950, officiellement d’une crise d’urémie, lui qui pouvait guérir les autres en quelques secondes. Mourir sur la croix est émouvant, certes, mais les crucifixions, surtout quand on les adore, ne font que perpétuer la loi de la mort. Ce n’est pas un corps crucifié qui sauvera le monde, dit la Mère, mais un corps glorifié.

* D'où l'utilité des mantra, qui peuvent canaliser une vibration d'une intensité déterminée en n'importe quel point du corps, ou en tous points, si le mental cellulaire s'en empare. 

SRI AUROBINDO ou l’aventure de la conscience              Satprem     p. 346-353

 

    Source de ces extraits de L’aventure de la conscience
     http://epanews.fr/profiles/blog/list?user=2b5ujw22gsg0o#.Vu0saq5livc   Anne


     

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Commentaire de Anne le 7 Avril 2016 à 12:27

Commentaire de LOTUS le 6 Avril 2016 à 20:40

Merci Anne pour ce partage

Commentaire de Anne le 19 Mars 2016 à 22:04

Commentaire de Anne le 19 Mars 2016 à 11:51

Le Sommet de la Conscience 2016 est arrivé!

du 20 au 30 mars

Voilà le programme

http://sommetdelaconscience.com/programme-2016/

TOUTES LES CONFÉRENCES SERONT REDIFFUSÉES PENDANT 48h

1/Ana Sandrea
Dimanche 20, 19h >>> Argent et Spiritualité : La fin du conflit & le début d'une nouvelle ère.

2/Thomas d'Ansembourg
Dimanche 20, 21h >>> La paix ça s’apprend à la maison, dans le couple, à l'école, dans la société et au travail

3/Arnaud Riou
Lundi 21, 19h >>> Réveillez le chaman qui est en vous

4/Isabelle Padovani
Mardi 22, 19h >>> Se rencontrer soi-m’aime et goûter l’unité au cœur de la relation

5/Christine Lewicki

Mercredi 23, 19h >>> Oser incarner sa vie et activer pleinement ses richesses

6/Eric Laudière
Jeudi 24, 19h >>> les constellations familiales au quotidien

7/Emilio Escariz et Romulo Pelliza
Vendredi 25, 19h >>> Voies d'éveil et technologies sacres : Yoga et Chamanisme

8/Olivier Chambon
Samedi 26, 19h >>> La conscience et l'âme : deux concepts maintenant bien scientifiques !

9/Conrad
Samedi 26, 21h >>> Ouverture et Eveil des cœurs et des consciences

10/Claudette Vidal
Dimanche 27, 19h >>> Le Bonheur d'être soi

11/Laura Marie
Dimanche 27, 21h >>> Indigos, Starseeds et missions de vie

12/Pascal Hastir
Lundi 28, 19h >>> Au-delà de la pleine conscience, l’auto-accompagnement

13/Stéphane Tetart
Lundi 28, 21h >>> Tous intoxiqué ! Quelles solutions ? Se protéger des métaux lourdes grâce à l'alimentation...

14/David Laroche
Mardi 29, 19h >>> Comment élever votre niveau de conscience pour davantage de paix et d'harmonie intérieure

15/Conférence de clôture
Mercredi 30, 19h >>> Intégrer les 10 jours et envisager l'après

En plus des conférences, vous trouverez ATELIERS et CONCERTS...

Une vidéo complétant l'article :

http://epanews.fr/video/jacques-ferber-faire-l-amour-la-vie-quand-l...

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