L'Evangile de Marie - Myriam de Magdala

« Pierre ajouta : « Est-il possible que l’Enseigneur se soit entretenu ainsi, avec une femme, sur des secrets que nous, nous ignorons ? Devons-nous changer nos habitudes ; écouter tous cette femme ? L’a-t-Il vraiment choisie et préférée à nous ? »

Le ton de Pierre ne trompe pas, il est réellement choqué qu’une femme puisse ainsi prendre la parole, dévoiler des « secrets » qu’eux, les proches de Yeshoua, ne connaîtraient pas. Les textes des premiers siècles ne manquent pas à ce sujet : Pierre ne semble pas particulièrement aimer les femmes ; il s’en méfie, même de sa propre fille !

A côté de l’Acte de Pierre du Codex de Berlin, Michel Tardieu nous rappelle à ce propos quelques textes significatifs : « Notre frère Pierre fuyait tout lieu où se trouvait une femme. Bien plus, un scandale étant arrivé à cause de sa propre fille, il pria le Seigneur, et le côté de sa fille fut paralysé, pour qu’on ne couche pas avec elle. » Une autre version du même événement nous est même proposée :

« Le chef des apôtres, Pierre, fuyait devant un visage de femme. En effet, sa fille étant jolie à voir, et ayant déjà provoqué un scandale à cause de ses belles formes, il se mit en prière et elle devint paralysée. »

Grâce à l’autorité de son père, Pétronille (c’est le nom de la fille de Pierre) mourra « sainte, vierge, martyre). La misogynie de Pierre n’explique pas tout. Comme André, ce qui le choque, c’est qu’une femme puisse avoir une primauté sur lui et sur ses hommes, qu’elle en sache plus qu’eux !

Pour un juif de l’époque, c’est quelque chose d’impensable. Comme tout homme pieux, chaque matin, Pierre remerciait Dieu de ne pas l’avoir créé « infirme, pauvre ou femme ». « Devons-nous changer nos habitudes ? » Respecter les femmes ? Leur donner une place, une autorité dans notre communauté ? Ne sont-elles pas créées pour servir ? Pour nous obéir, et nous satisfaire quand nous le leur demandons ?

Ces « habitudes » ne sont pas seulement sociales pour Pierre, elles sont aussi religieuses, et le comportement de l’Enseigneur à l’égard des femmes demeurera vraiment pour lui un mystère, qu’il s’agisse de la Samaritaine, de la femme adultère, ou de Myriam de Magdala, ces femmes qu’Il choisit, pour leur révéler « la prière en Esprit et en Vérité » (la Samaritaine), « la Miséricorde et le Pardon du Dieu vivant » (la femme adultère) et enfin la Résurrection (Myriam de Magdala) ; l’essentiel même de ce qu’on appellera le Christianisme !

Plus prosaïquement, nous pourrions dire que Pierre, « le chef des apôtres », a tout simplement peur des femmes, et c’est à cause d’une femme, d’une servante qui venait se chauffer près de lui auprès du feu, qu’il trahira par trois fois son Maître, ce Maître qu’il avait juré de « ne jamais trahir, quand bien même tous les autres le trahiraient. » Il me semble pas que Pierre ait compris la leçon, et il n’est pas sûr qu’elle soit aujourd’hui comprise. « Devons-nous changer nos habitudes ; écouter tous cette femme ? » N’est-ce pas d’abord un signe de santé « biblique » que de choisir et de préférer une femme plutôt qu’un homme, pour partager son intimité ? N’est-ce pas ensuite un signe du réalisme de son humanité ?

Mais l’essentiel est certainement encore plus profond ; avant de vouloir être spirituel, « pneumatique », sans doute faut-il accepter d’avoir une âme (psyché) et un corps (soma). L’acceptation de notre dimension féminine et psychologique est la condition même pour avoir accès au noùs ou à la dimension masculine de notre être. Comme le faisait remarquer Graf Dürckheim, la découverte ou la redécouverte du spirituel, aujourd’hui comme hier, passe par une réconciliation avec le féminin. Le but, ce sont les noces du masculin et du féminin : l’Anthropos.

Il faut que ces noces commencent en nous au niveau social, au niveau neuro-physiologique (les deux hémisphères du cerveau) et à un plan plus universel (la rencontre pour une véritable alliance, sans opposition et sans confusion entre l’Orient et l’Occident). Pierre n’est pas encore dans le climat de cette « nouvelle Alliance », proposée par l’Enseigneur ; le « climat » de la jalousie le retient en arrière, dans cette méfiance du féminin qui l’empêche d’intégrer « la part manquante » de son être aimant. Alors Marie pleura. Elle dit à Pierre : « Mon frère Pierre, qu’as-tu dans la tête ? Crois-tu que c’est toute seule, dans mon imagination, que j’ai inventé cette vision, ou qu’à propos de notre Enseigneur je dise des mensonges ? »

Devant l’incompréhension de Pierre, Myriam retrouve ses larmes, non pas celles –qu’elle connaît bien – de l’amour, de l’émerveillement ou de la séparation, mais celles de l’enfant devant un adulte qui ne le croit pas, au moment même où il ouvre son cœur et dit toute sa vérité : Elle dit à Pierre :« Mon frère Pierre, qu’as-tu dans la tête ? » D’abord elle s’adresse bien à son « frère », ou pourrait dire son ami, puisque c’est un des exercices que leur a laissé l’Enseigneur, ne pas se donner de maître ou de rabbin parmi eux : tous sont frères et sœurs, c’est à cet amour fraternel qu’on peut les reconnaître comme Ses disciples. Myriam ne s’adresse pas à Pierre comme à un pape ou à un évêque, pas même comme à un supérieur, qui aurait des droits sur elle, mais comme à un frère qui la blesse et ne la comprend pas. Pierre est bien « dans sa tête », il n’est pas dans son cœur et qu’a-t-il « dans la tête » ?

Du doute, de la suspicion, plus que du discernement. Et qu’a-t-il dans le cœur ? De la jalousie et peut-être même du mépris, en tout cas pas cet « a priori de bienveillance » qui permet à quelqu’un d’écouter un discours avec lequel on n’est peut-être pas toujours d’accord, mais qu’on tente au moins de comprendre… « Crois-tu que c’est toute seule, dans mon imagination, que j’ai inventé cette vision ? » Myriam l’affirme. Elle n’est pas « toute seule ». Pour qu’il y ait « vision » dans le sens que nous avons étudié, il faut au moins être deux, celui qui voit et celui qui se donne à voir.

L’ « Imagination » peut produire toutes sortes d’images et de représentations, bien sûr, mais cela n’a pas la puissance de l’Image et de la Présence qui s’est « présentée » au noùs, à la fine pointe de l’âme de Myriam. On n’invente pas le Réel, on le voit, et on le voit dans la forme qui nous est accessible : ce n’est pas le Tout du Réel, et pourtant c’est bien lui ; un rayon de soleil n’est pas tout le soleil, et pourtant c’est bien le soleil. La tentation est grande pour André et Pierre de penser que Myriam « se raconte des histoires » ; l’histoire, eux, ils la connaissent, mais avec les sens et la raison. Mais ce que ne peuvent pas connaître les sens et la raison, c’est la métahistoire, l’épiphanie d’un monde et d’une conscience Autre, d’un « Autrement qu’Être », au cœur même de cette histoire.

Cela demande l’ouverture des portes de la perception, l’éveil du noùs, l’accueil du Pneuma, du Saint-Esprit que la tradition chrétienne appellera le Consolateur, celui qui est avec celui qui est seul (con-solus). Myriam n’est pas seule dans son imaginaire, elle est visitée par l’Esprit de Celui qui a dit : « Je ne vous laisserai pas seuls » (Jn 16). Cet Esprit réactive les images qu’elle porte en elle, Il leur donne une existence qui n’est pas seulement celle d’une mémoire. La Présence de l’Enseigneur, l’Archétype de la Synthèse, l’Homme accompli, Fils de Dieu et Fils de l’Homme, est une « Présence réelle ».

On pourrait dire que s’opère en Myriam, sous la mouvance de l’Esprit (Pneuma), une sorte de transsubstantiation de l’image de l’Enseigneur qui devient véritablement vivant, ressuscité en elle. Cette vie se manifeste par un certain nombre de symptômes, qu’une simple remémoration ou imagination ne pourrait pas produire : lumière, chaleur, mais surtout paix, patience, confiance, amour.

Il est intéressant de noter que, dans la tradition du christianisme orthodoxe transmise jusqu’à nos jours, au moment de l’Epiclèse, on demande au Saint-Esprit « de descendre sur nous et sur ces dons » (le pain et le vin) afin qu’ils soient réellement transformés en « corps et sang », « action et contemplation » du Christ vivant au milieu de nous. Myriam, d’une certaine façon, a vécu cette Epiclèse : le Saint-Esprit (Pneuma) est venu informer son intelligence et son cœur (noùs, kardia), afin que l’Enseigneur se donne réellement à voir à elle et qu’Il continue ainsi à l’enseigner. »

Jean Yves Leloup

Evangile de Marie

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Commentaire de Lovyves le 13 novembre 2012 à 23:26

Donc Marie Madeleine ne nous devancera pas dans les cieux, car :
".. les prostituées vous devancent dans le royaume de Dieu. (Matthieu 21:31)" !
Qu'il est doux que Jésus soit mort !
Il n'est pas là pour contredire nos affirmations !

Merci beaucoup Santorine, de votre réponse, oui c'est très gentil.
Ce n'est pas un pavé dans la marre, mais, insidieusement, pour amener à la réflexion du sens que l'on met à ce qui nous plait ou déplait.

"évangélistes" , ce n'était que de l'humour!
il m'arrive de ne pas être bon !!!

Au sujet des évangiles apocryphes, je m'y suis très intéressé, il y a une trentaine d'années, et je les considère toujours comme références autant, voir plus que les 4 canoniques.
Par contre, les interprétations de X ou Y, soit disant patentés pour interpréter: intéressant, mais plus souvent proche d'élucubrations de personnes qui veulent "faire rentrer" dans leur idéologie personnelle, les écrits du passé.

Commentaire de Pastorseraphim le 13 novembre 2012 à 23:16

Plus important que ces paroles irritantes rappelant aux disciples les limites de leur compréhension, l'Évangile de Marie témoigne d'un mode de connaissance autre, différent de celui auquel l’esprit masculin a généralement accès.

 

Il s'agit d'une connaissance de type prophétique ou vision­naire qui n'est pas le propre des femmes, mais qui appartient certainement à la dimension féminine, angélique ou « orien­tale» de la connaissance humaine.

 

L'Enseigneur est interrogé à ce propos. Quel est l'organe de la vision? Avec quels «yeux» Myriam de Magdala peut-elle contempler le Ressuscité?

 Les réponses de l'Enseigneur sont nettes.

Le Ressuscité n'est pas visible aux yeux de chair ni aux yeux de la psyché («  âme ») au sens ordinaire du terme; ce n'est pas une hallucination, ni un fantasme lié à quelques exci­tations, sensibles, psychiques ou mentales; il ne s'agit pas non plus d'une vision «pneumatique» ou spirituelle.

 

Selon l'Évangile de Marie, il s'agit d'une vision par le noùs, dimen­sion souvent oubliée de nos anthropologies. Le noùs est consi­déré par les anciens comme la «fine pointe de l'âme» - on dirait aujourd'hui «l'ange de l'âme»; il donne accès à ce monde intermédiaire, ni seulement sensible ni seulement intelligible: 1'« Imaginal» dont parle avec précision Henry Corbin.

 In l'évangile de Marie de JY leloup

Commentaire de Pastorseraphim le 13 novembre 2012 à 22:40

Ma source, pour ce texte, c'est " l’Évangile de Marie" de Jean Yves Leloup. et voici ce qu'il dit concernant l'histoire de cet Évangile :

À côté de ces Évangiles désormais mieux connus, il en est un qui ne semble pas avoir suffisamment retenu l'attention des spécialistes et qui demeure pratiquement ignoré du grand public. Il s'agit de l'Évangile de Marie, attribué à Myriam de Magdala, premier témoin de la Résurrection, et par ce fait considérée par l'apôtre Jean comme étant, bien avant Paul et sa Vision sur le chemin de Damas, la fondatrice du christianisme.

L'Évangile de Marie est le premier traité du papyrus de Berlin . Ce papyrus fut acquis au Caire par C. Reinhardt, et il est conservé depuis 1896 au département d'Égyptologie des musées nationaux de Berlin. Il proviendrait d'Achmin ou de ses environs, puisqu'il apparut d'abord chez un antiquaire de cette ville. D'après C. Schmidt, il aurait été recopié au début du Ve siècle.

Comme les autres écrits du papyrus de Berlin et comme l'Évangile de Thomas, l'Évangile de Marie est écrit en copte sahidique, avec un certain nombre d'emprunts dialectaux; on peut relever également quelques fautes d'écriture, ou fautes de transcription.

La première rédaction de l'Évangile devrait donc avoir été faite antérieurement, c'est-à-dire au cours du Ile siècle. Till la situe aux alentours de l'an 150. Il s'agirait donc bien, comme les autres Évangiles, d'un des textes fondateurs ou primitifs du christianisme. 

C'est un Évangile sinon écrit, du moins inspiré par une femme: Myriam de Magdala. 

Ainsi, parmi tous les Évangiles écrits ou attribués à des hommes, il y aurait un Évangile écrit ou attribué à une femme. Cette femme serait Myriam de Magdala.

Myriam n'est pas seulement la pécheresse dont nous parlent les Évangiles canoniques, ni celle des traditions récentes, qui confondent son « péché» avec une certaine désorientation de ses forces vives et sexuées ...

 Elle est aussi l'amie intime de Yeshoua, « l'initiée» qui transmet Ses enseignements les plus subtils 

Non seulement Myriam de Magdala est une femme, mais une femme qui aurait accès à la  « connaissance ».

 Et c'est en ce sens, sans doute, qu'elle était, à l'époque de Yeshoua, considé­rée comme « pécheresse»; elle ne se conforme pas aux lois d'une société où la connaissance est affaire d'hommes et où les femmes n'ont pas le droit d'étudier les secrets de la Thora ni d'interroger les chiffres clairs ou obscurs de ses lettres carrées.

Commentaire de Pastorseraphim le 13 novembre 2012 à 21:46

Non seulement Myriam de Magdala est une femme, mais une femme qui aurait accès à la  « connaissance ».

 Et c'est en ce sens, sans doute, qu'elle était, à l'époque de Yeshoua, considé­rée comme « pécheresse»; elle ne se conforme pas aux lois d'une société où la connaissance est affaire d'hommes et où les femmes n'ont pas le droit d'étudier les secrets de la Thora ni d'interroger les chiffres clairs ou obscurs de ses lettres carrées.

Les discours qu'elle tient aux disciples ne peuvent que les irriter. Pour qui se prend-elle?

 Il ne lui suffit pas d'être aimée de l'Enseigneur, il lui faut encore s'approprier Son enseigne­ment et jouer les « initiées»; elle emprunte les paroles mêmes de Yeshoua lorsqu'Il se trouvait en présence d'intelligences « non préparées », plus ou moins bornées, prenant pour réel ce qu'elles tiennent dans le champ clos de leurs perceptions:

« Comprenne qui pourra. »

 

Commentaire de Lovyves le 13 novembre 2012 à 21:09

Bonsoir à Tou(te)s
Sandorine aurait elle la gentillesse de me dire à quel moment je joue au ping-pong ?
Ne sachant pas que veut dire "aimer beaucoup X", je vois pas de jeu là dedans.

Commentaire de Pastorseraphim le 13 novembre 2012 à 20:30

Merci Paracacho,

Tes interrogations, soulevés avec justesse résonnent en moi.

Une seule et même femme, plusieurs, une image de la femme en construction et en évolution constante dans l'église et dans la société ?Peut être un peu de tout cela, un récit des évangiles qui questionne, encore de nos jours, c'est aussi cela qui est en jeu.Des textes et un personnage, Jésus, qui par son comportement scandalise ces contemporains et qui nous interroge, sur la place Féminin en nous, autour de nous au delà de nous. 

Marie, Myriam, goutte d'Océan, qui conduit nos soif vers la source...

Voyons ce qu'il y avait dans le livre de Jean Yves Leloup à ce sujet, puisque c'est la base de ce post et tout d'abord ce qu'en dit Michel Tardieu, éditeur du Codex de Berlin :

; les Évangiles canoniques se faisaient déjà l'écho de légendes à son sujet:

 

«Tous reconnaissent qu'elle faisait partie des femmes qui avaient suivi Jésus, qu'elle avait assisté à la mort de Jésus sur la croix et que c'était "d'abord" (Mc 16, 9) à elle que Jésus était apparu le matin de sa résurrection. Il est probable que c'est en raison de la croyance à ce dernier fait qu'elle est nommée en tête des listes de femmes qui suivent Jésus.

D'autre part, Mc 16, 9 et Le 8, 3 disent que Jésus avait chassé d'elle sept démons.

Personnage contrasté: ex-possédée, compagne de Jésus, premier témoin de la résurrection. Il y avait là de quoi nourrir l'imaginaire chrétien.

 La Marie­ Madeleine qui entre comme armature romanesque dans l'Évangile du Codex B est devenue à la fois la confidente de Jésus, son substitut et son exégète.

Jésus lui confie des paroles qu'ignorent les autres disciples, elle occupe la place laissée vacante par Jésus, elle communique les secrets reçus et les explique.

Ce rôle d'intermédiaire entre Jésus et les disciples reposait sur la croyance à la position de Marie-Madeleine comme compagne de Jésus durant sa vie et premier témoin de la résur­rection.

 Elle était celle qui, ayant suivi Jésus de bout en bout et parce que présente au matin de Pâques, avait été gratifiée de révélations spéciales. Dans la croyance commune, l'après résurrection est le temps des révélations décisives qui précèdent le départ définitif de Jésus et l'envoi en mission des disciples.

 Parce qu'elle est la première à "avoir vu le Seigneur" an 20, 18), sa présence au milieu des disciples enregistrant les dernières paroles de Jésus s'impose comme thème nécessaire aux Évangiles de l'après-résurrection.

Commentaire de parachaco le 13 novembre 2012 à 18:27

j'ai retrouvé dans mes archives ceci:

si cela peut aider?

Mais de qui parlons-nous ?

Ici commence l’énigme : pour tenter de cerner le personnage, il nous faudra, nous accommoder d’emblée de la confusion comme compagne de route.

Myriam, c’est à dire Marie en Hébreu, de Magdala, qui en Français a donné Madeleine. Est-ce à dire que Myriam de Magdala serait tout bonnement une manière sophistiquée de désigner Marie-Madeleine ? Ce serait trop simple …

 

Les évangiles canoniques évoquent en effet, de manière discontinue, plusieurs « Myriam »: La pécheresse, c'est cette femme qui s'introduit chez Simon le pharisien à l'occasion d'un dîner auquel il avait invité Jésus. Elle se précipite à ses  pieds qu'elle embrasse, qu'elle inonde de ses larmes, qu'elle oint de parfum, qu'elle essuie de ses cheveux. Au grand scandale de l'assistance Jésus lui pardonne ses péchés et la renvoie lui disant: « Ta foi t'a sauvée; va en paix ». (Luc 7, 36-50).

Son nom, l'évangéliste ne le précise pas, mais dans les lignes qui suivent, il nous présente les femmes qui suivaient Jésus et la toute première est Marie de Magdala dont étaient sortis sept démons, (Luc 8,2), la première aussi à qui apparaîtra le Christ après sa résurrection: « Jésus apparut d'abord à Marie de Magdala dont il avait chassé sept démons. » (Marc 16,9).
   
   Quant à Marie de Béthanie, elle nous est présentée comme la sœur de Marthe et de Lazare avec cette précision: « Cette Marie était celle qui oignit le Seigneur de parfum et lui essuya les pieds avec les cheveux » (Jean 11, 2): la pécheresse donc, qui va renouveler son geste quelques jours plus tard, oignant les pieds du Christ de nard, un parfum très cher dont l’usage est réservé à la divinité, chez Simon le lépreux. C'était alors six jours avant la crucifixion (Jean 12,1-11). Voilà donc deux onctions, mais à deux endroits différents, à deux moments différents, chez deux personnes différentes. Dans la première, le Christ est celui qui remet les péchés; dans la seconde il annonce sa sépulture: « laisse-la, dit-il à Judas. C'est pour le jour de ma sépulture qu'elle devait garder ce parfum. »

 

 

 Il y a donc la pécheresse, qui en signe de repentir versa ses larmes sur les pieds du Christ ; il y a Marie de Béthanie, sœur de Lazare, celle qui oignit de parfum la tête de Jésus, faisant ainsi de lui le «christos», l’ «oint» et donc le messie attendu par les juifs, il y a enfin Myriam de Magdala, délivrée par le Christ de 7 démons, qui devint sa disciple, le suivit au Golgotha et trouvant vide son tombeau, fut le premier témoin de sa résurrection.

 

Les versions des évangiles canoniques diffèrent, entremêlent les Myriam dans un kaléidoscope énigmatique, où la quête se perd à vouloir trop saisir. Et l’énigme perdure à travers les légendes et les mythes, certains la faisant terminer ses jours à Ephèse en compagnie de Jean l’Evangéliste, d’autres au milieu du désert, d’autres encore dans les Terres de Provence, la Sainte-Baume ou les Saintes-Maries de la Mer. Jusqu’à sa dépouille, qui sera revendiquée à pas moins de trois endroits différents …

 

La Femme a toujours dérangé l’Eglise.

Trois femmes, trois difficultés : dans un souci de simplification bien compréhensible, le bon pape Grégoire, au 6e siècle, décrète dans sa grande sagesse que ces trois Myriam n’en feront désormais plus qu’une. Une sorte de trinité inversée, si l’on veut, qui viendra bien à point pour servir à travers le temps la cause de l’Eglise.

 

En effet, on ne sait trop que faire à Rome de cette pécheresse potentielle. Sa sensualité de prostituée est un piège pour l’homme. Pour l’empêcher de nuire, il faut donc qu’elle soit soumise, pleurante et prosternée.

 

Au fil du temps, l’image de Marie-Madeleine pénitente se renforce, à mesure que l’Eglise entend se servir de la pénitence comme d’un instrument de domination.

 

Dès le XIIe siècle, l’image se recentre autour de la pécheresse pardonnée, celle qui se rachète par l’espérance. Le sexe étant considéré comme source de tous les péchés, la femme doit consumer sa féminité pour être admise au paradis.

 

De nos jours, cette image évolue encore, une certaine mouvance catholique progressiste allant jusqu’à faire de Myriam celle par qui le Christ, vivant sa sexualité, réhabilite celle-ci et sauve l’être humain en tant qu’être complet, corps, cœur et âme.

 

Trois femmes qui n’en font qu’une donc … tout étant symbole dans les écrits bibliques aussi, il  se pourrait effectivement qu’il s’agisse de la même Myriam, à des phases différentes de son évolution. Ou encore de diverses facettes de la même femme.

 

Commentaire de Pastorseraphim le 13 novembre 2012 à 15:15

"vos commentaires, sont plutôt de l'Hébreu pour moi."

Dit Lovyves :

Is Raëlite ?

Commentaire de Lovyves le 13 novembre 2012 à 12:25

Bonjour les évangélistes
Que veut dire : "j'aime infiniment X" ou "j'aime beaucoup Y"
!?
Et, le fait d'être : " en accord avec X", ou en désaccord avec Y", est ce que ceci ou cela donne du poids au commentaire de X ou Y
!?
Car, présentement vos commentaires, sont plutôt de l'Hébreu pour moi.
merci d'avance.

Commentaire de Pastorseraphim le 13 novembre 2012 à 10:15

Merci Monikaren,

je connais aussi Jacqueline, c'est vraiment une " Marie Madeleine", une femme inspirée, drôle et spirituelle, evidemment, son livre reste une référence amoureuse majeure.

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