Nos nuits sont peuplées d’images, de mots et de symboles. Les décoder nous permet de voir clair en nous. Mais en travaillant sur nos rêves, nous pouvons aussi transformer concrètement notre vie, explique la thérapeute Layne Dalfen.
Petit manuel d’utilisation et d’interprétation pour une nouvelle approche de ce continent mystérieux.
Les songes constituent un matériau d’une richesse inépuisable pour nous permettre de devenir les créateurs de notre vie. Depuis Freud, on sait que l’inconscient s’exprime sans entraves dans notre sommeil. En dévoilant des pans enfouis du moi, l’analyse des rêves permet de mieux se connaître. Mais aussi – c’est l’originalité de la démarche de Layne Dalfen (membre de la Jung Society et de l’International Association for the Study of Dreams, Layne Dalfen, Gestalt-thérapeute américaine, a fondé le Dream Interpretation Center, à Montréal, et anime de nombreuses émissions radiophoniques au Canada et aux Etats-Unis), Gestalt-thérapeute américaine – de trouver des clés à nos problèmes.
Dans Dreams Do Come True (Les rêves se réalisent vraiment, ouvrage non traduit en français - Adams Media Corporation, 2002), elle expose une méthode pratique pour débloquer les situations. Selon elle, tout notre potentiel s’exprime à travers les rêves. Formée aux techniques d’interprétation de Freud, de Jung et de l’école de la Gestalt, elle ne pense pas qu’il existe de grille de lecture universelle. Chacun développe une symbolique qui lui est propre et qu’il est seul à même d’analyser : un chien, un lac, une forêt auront des significations radicalement différentes selon les individus.
Une exploration fructueuse, à condition de ne pas s’autocensurer et de faire preuve de persévérance.
Tout enregistrer dès le réveil
Rien de plus évanescent que les rêves ; à peine sommes-nous levés que des séquences entières s’effacent de notre mémoire. Il importe donc de les recueillir dès le réveil. Dans ce but, prévoir un cahier et un stylo à portée de main. On s’efforcera de tout noter : protagonistes, événements, émotions, etc., l’idéal étant de disposer d’un magnétophone. Il permet en effet de raconter son rêve en gardant les yeux fermés, ce qui est le meilleur moyen de se remémorer le plus grand nombre d’éléments.
Sélectionner son rêve
Les rêves s’articulent souvent autour d’un même thème mais mettent en scène des symboles différents. L’important : recueillir le rêve le plus marquant. Comment le reconnaître ? Il a tendance à se répéter ou suscite des émotions très fortes. Ceux qui rêvent trop peuvent formuler à haute voix : « Cette nuit, je préfère ne pas rêver », ce qui permet de limiter la production onirique. On peut aussi se concentrer sur un problème précis et demander à son inconscient d’y travailler : « Cette nuit, je veux faire un rêve important. » Enfin, même si l’on ne se souvient que de bribes, il est utile de les noter.
Scruter chaque élément
Pour analyser le rêve, on établira un tableau en quatre colonnes. Dans la première, le récit complet sera restitué. Dans la deuxième colonne, on notera les émotions associées à chaque étape (tristesse, stupeur, soulagement) ; puis chaque symbole (personne, animal, paysage) sera entouré, et les actions ou absences d’action (courir, rester sans voix), y compris les paroles échangées, seront soulignées. Dans la troisième colonne, on tentera de définir le sens de chaque symbole, en mêlant définition objective et évocation personnelle. Exemple : « Un guépard chasse pour se nourrir, court très vite, je le trouve élégant, etc. » S’il s’agit d’une personne, on notera les premiers qualificatifs qui viennent à l’esprit (opiniâtre, accueillant…) ou un événement marquant qui lui est associé (dispute, retrouvailles…). Dans la quatrième colonne seront consignés les aspects répétitifs : la même émotion provoquée par des situations différentes, un personnage ou un paysage qui apparaissent à diverses reprises, d’éventuels homonymes (« mer » et « mère »). L’inconscient martèle ses messages ! On y inscrira aussi les polarités (un loup, un agneau ; le jour, la nuit) et les paradoxes (des ciseaux servent à détruire, mais aussi à créer). En mettant en scène des pôles opposés, notre inconscient cherche parfois à nous inciter à revenir à une position médiane, plus équilibrée.
Décrypter le scénario
Généralement, les rêves racontent des situations dont nous souffrons ou des problèmes que nous ne parvenons pas à résoudre. Encore faut-il pouvoir en décrypter le scénario. Layne Dalfen conseille la technique d’« association directe » : on examine un élément, on réfléchit à ce qu’il évoque, on revient au rêve, on analyse un deuxième élément, etc. On commencera par les points les plus spectaculaires ou ceux liés à des émotions fortes. Par exemple : « Un ours m’attaque. Quelque chose de massif et d’effrayant s’approche-t-il dans ma vie ? » Ou : « Je ne peux parler. Y a-t-il quelqu’un à qui je ne parviens pas à dire quelque chose ?» Si l’on a rêvé d’une personne précise, elle symbolise souvent une autre liée à des soucis précis. Ainsi, un ami qui trahit peut refléter la crainte d’être trompé par un partenaire amoureux. Enfin, même si l’on commence par les points forts, il est important de tout scruter, car les « détails » se révèlent parfois fort significatifs.
Interpréter tous les rôles
Une fois que l’on a saisi ce qui sous-tend le rêve, on analysera sa logique interne. On dispose d’un « film » dont on est le scénariste, le metteur en scène, tous les acteurs, et même le décor ! Si l’on joue souvent le rôle d’un personnage proche de ce que nous sommes, les autres protagonistes évoquent les aspects sous-investis de notre personnalité. Pour se mettre à leur écoute, on les incarnera. On prendra un symbole – homme, avion, montagne – et on le "jouera", en disant ce qu’il fait, ce qu’il ressent…
On procédera de même avec un autre symbole. On imaginera ensuite une conversation entre eux, et l’on observera ce qu’ils apprennent l’un de l’autre, leurs points communs, leurs désaccords.
Retravailler le scénario
Prendre du recul et évaluer le rêve permet de comprendre ce qui ne "va pas" dans le scénario. Et donc dans sa vie. Les actions des protagonistes sont-elles efficaces ? Peut-on s’en inspirer ? A défaut, qu’est-ce qui aurait été préférable ? On s’interrogera sur les éléments qui manquent, ils désignent souvent quelque chose que l’on ne parvient pas à réaliser. Si l’histoire finit mal, ou s’interrompt brusquement, c’est le moment de lui donner une fin plus satisfaisante : que faut-il modifier, soustraire, ajouter ?
Peu à peu, on met ainsi en lumière les ressorts cachés de notre fonctionnement psychique. L’histoire symbolique est une sorte de terrain d’entraînement qui permet d’aborder la vie réelle en possession de tous ses moyens. La meilleure façon de pouvoir la changer !
Dans son ouvrage Dreams Do Come True, la Gestalt-thérapeute américaine Layne Dalfen rapporte l’histoire de l’un de ses patients qui illustre l’importance du moindre détail dans les songes. Etudiant en fin de maîtrise, celui-ci avait rêvé qu’il attendait un ascenseur à côté d’une photocopieuse. Quand les portes s’étaient ouvertes, il avait rejoint un homme en sanglots, qui lui avait expliqué la raison de ses pleurs : un professeur l’avait critiqué parce qu’il avait affirmé ne pas croire en Dieu.
Après coup, le jeune homme eut un déclic quand il examina un aspect mineur en apparence : la photocopieuse. Une machine qui sert à produire des copies identiques à l’originale. Or, l’étudiant hésitait à poursuivre ses études en vue d’un doctorat. Il prit conscience que cette perspective lui déplaisait, car les docteurs de son université lui semblaient tous formatés sur le même modèle, suivant avec une foi aveugle une voie toute tracée. Témoin l’homme en pleurs, car il était sorti de la norme et avait été critiqué pour sa non-croyance en Dieu. L’étudiant décida d’arrêter ses études et partit à l’étranger. Ce dont il rêvait, à l’état éveillé cette fois !
(Karen Isère)
Carl Gustav Jung a défini les archétypes – notion clé de sa psychologie analytique – comme « des images originelles existant dans l’inconscient » : ce sont des symboles universels, ou des thèmes universels, qui peuvent apparaître au cours des rêves de chacun d’entre nous parce qu’ils sont « stockés » dans l’inconscient collectif depuis l’aube de l’humanité. Le dragon, le héros, le vieux sage, le poisson, le sable, le cristal, la mère, le trésor sont des exemples d’« images archétypales ». Le héros qui tue le dragon, le baptême, la confrontation entre le bien et le mal sont des « motifs archétypiques ».
Selon Jung, ce ne sont pas seulement des images, mais aussi des « centres chargés d’énergie » qui surgissent dans nos rêves lorsqu’un problème ou une situation psychologique difficile les mettent en action. Les archétypes sont porteurs d’une évolution intérieure et de solutions pour résoudre une difficulté spécifique.
A condition, bien sûr, d’être capable de les identifier et de comprendre leur message…
Commentaires bienvenus
Nous sommes toutes et tous reliés.
:)
Intéressant tout ça. Merci Isabelle, merci Clarine.
Les rêves peuvent être des "voyages astraux" et donc te montrer des images du réel qui se déroulent simultanément.
Certain(e)s discutent ainsi avec leurs morts ; ce sont les spirits, les médiums. Médium, nous le sommes tous, plus ou moins. C'est aussi une question de mémoire du rêve…
Certains indiens d'Amérique utilisent les rêves pour l'éducation de leurs enfants en les encourageant à intervenir différemment dans le rêve. S'ils sont poursuivis par un jaguar par exemple, ils doivent lui tenir tête au lieu de fuir…
Si on surmonte sa peur dans le rêve, on la surmontera dans le réel. Je pose souvent la question à ma fille : tu as rêvé ? Et elle me raconte. Ensuite, on en discute. C'est mes lectures sur les indiens d'Amazonie qui m'ont donné l'idée de faire cela avec elle, comme avec mon fils quand il était petit.
Oui, comme tu dis "feuilletons", il y a des rêves qui ont une suite, on peut se rendormir pour connaître la suite, même si cela ne fonctionne pas à tous les coups. Il y a aussi des rêves récurants, ceux qui reviennent, peut-être, jusqu'à que l'on comprenne le message qu'ils nous portent.
Enfant, j'ai souvent rêvé que j'étais au bord d'une falaise avec la mer en bas. J'en tombais ou je m'y jetais dans le vide et me réveillais en sursaut juste avant de m'écraser. J'ai rêvé aussi que je volais dans l'espace étoilé, et aussi à l'intérieur des habitations (devant ma famille qui tremblait de peur me voyant d'en bas alors que j'étais collé au plafond !).
Les rêves peuvent donner des indications mais il ne faut jamais les prendre à la lettre car les forces du Bien comme celle du Mal peuvent nous faire rêver et croire à toutes sortes de choses. Les forces du Mal cherchent toujours à nous induire en erreur, à nous tromper, à nous faire peur, à nous faire perdre du temps avec du mensonge. Les forces du Bien, c'est l'inverse : elles nous instruisent. C'est là où notre discernement raisonnable, ressenti paisiblement, est primordial. Il faut garder la raison, toujours, ne pas se faire des idées à la va-vite !
Merci encore pour ce texte que j'ai imprimé pour le donner à chacun de mes enfants. Oui, pour moi aussi les rêves, c'est captivant. Bises belle Isabelle ! Et rêve bien ! Plus on y travaille, un papier-crayon à portée de main, plus on s'en souvient. Pour le moment, je n'ai pas le temps car je dois me lever d'un bond tous les matins.
:)
Clarine
Clarine, ton ressenti est passionnant. Les rêves animent mes nuits. Surtout dans la phase du pré-réveil . Alors je garde en mémoire le film exact des scénarios . Ils touchent souvent des évènements récents , des personnes de mon entourage, ainsi que des êtres chers disparus. Souvent, j'ai remarqué leurs volontés à te culpabiliser, destructeurs et l'angoisse m'anime.. Il m'arrive parfois de les voir se poursuivre d'une nuit à l'autre, comme si j'avais le pouvoir de les inscrire dans des feuilletons illimités . Curieux non ? Le réveil peut-être aussi brutal , cette sensation d'être précipitée dans un précipice sans fin... Houps !!!
Merci isabelle, c'est très intéressant les rêves, et cet article est instructif.
J'ai tenté déjà il y a longtemps d'enregistrer ma voix dans mes rêves puisque je parle en dormant. J'avais réussi à le faire endormie mais la voix traînait, je crois qu'il fallait accélérer le défilement de la bande pour y comprendre quelque chose et encore : raté donc. Le papier crayon dès le réveil, c'est mieux pour moi.
Maintenant, c'est ma fille qui note parfois ce que je dis en dormant et cela est en général un message très instructif pour moi que je suis la seule a interprêter ; pour les autres : cela ne veut pas dire grand-chose. Une des dernières fois, j'ai dit : "tout est une question de compréhension et de schémas". Et bien, dans mon contexte très difficile, cela m'a été très utile de recevoir et de savoir ce message…
Je pense que la vie peut être vue comme un rêve et analysée exactement de la même façon. Par exemple si je croise un chevreuil en voiture sur la route ou si mon attention se pose sur un chien qui aboie au loin, ou si je tombe sur une iris sauvage en me promenant, cela n'a pas le même sens dans mon ch'milblic ! Les rencontres et les prénoms et noms des personnes, des lieux, sont "parlants". En réalité, tout est "parlant"…
En fait, chacun se crée sa légende qui est inscrite dans les symboles qui jalonnent sa vie et la conscience qu'il (elle) en a. Nous sommes d'abord des êtres pensants et je crois que les premiers humains, les hommes des cavernes méditaient en permanence, leur cerveau était en éveil, plus que le technicien d'aujourd'hui avec sa science apprise dans laquelle, au final, il ne sait plus ce qu'il fait et pour qui et quoi il travaille…
:)
Clarine
bon moi je reprends un peu les etudes mais pour une formation courte j'espere que ca va bien se passer mais je vais noter mes reves pour orienter au mieux mes stages et leur forme et aussi ma sortie de la formation pour reussir la recette du "chef" lol merci pour le mess
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