Méfions-nous des idées reçues : être gentil, ce n’est pas dire oui à tout, mais, au contraire, savoir s’affirmer face à l’autre dans une bienveillance assumée. Un état d’esprit bénéfique pour la santé physique et psychique qui se révèle souvent contagieux.
Être gentil, ce n’est pas être naïf, ni se faire avoir. Ça, c’était avant, quand nous pensions que, pour réussir, il fallait être cynique et égoïste. Aujourd'hui, la gentillesse, qui embrasse générosité, bienveillance et altruisme, est devenue incontournable au bonheur d’être soi, de vivre et travailler ensemble, une évidence partagée par – presque – tout le monde.
Nombreuses sont en effet les études scientifiques qui prouvent qu’elle est bénéfique pour la santé physique et psychique. De plus en plus de managers réalisent aussi qu’elle est indispensable dans le monde du travail. Et quelques économistes éclairés, comme Jeremy Rifkin, annoncent que seules l’entraide et la collaboration pourront nous sortir de la crise économique et écologique. Dans son ouvrage Plaidoyer pour l'altruisme, le moine bouddhiste Matthieu Ricard démontre que, dans divers domaines, les valeurs de coopération progressent.
Bien sûr, nous avons encore parfois de vieux réflexes qui nous reviennent. Nous avons appris, enfants, à ne pas parler aux inconnus, à nous montrer méfiants. Nous avons ensuite compris, à l’école, qu’être gentil n’était pas valorisé : « fayot », « lèche-bottes »... Pour être accepté dans la bande, mieux valait ricaner de celui qui tombait que l’aider à se relever. Au travail, cela ne s’est pas arrangé, puisque, pour grimper les échelons, nous avons cru comprendre qu’il fallait écraser les autres. Un cynisme qui n’est plus de mise aujourd’hui. Mais, si la gentillesse est une valeur montante, encore faut-il en cerner les contours. Il y a quantité de fausses gentillesses, qui en ont l’apparence mais pas la motivation. Côté manipulation trône le calculateur, celui qui est gentil pour arriver à ses fins. Ou celui qui se réfugie dans l’obséquiosité pour mieux pousser son interlocuteur à l’agacement. Il y a encore la gentillesse sélective : sympa avec le patron, moins avec la caissière.
D’autres motivations sont parfois plus difciles à démasquer. La gentillesse par excès de zèle ou de galanterie, quand nous voudrions être vus ou reconnus. La gentillesse en miroir, qui consiste à faire à l’autre ce que nous aimerions qu’il nous fasse. Celle qui cherche à éviter la dispute. Ou une autre que nous partageons tous, qui cache notre peur de ne pas être aimés. « Nous sommes souvent gentils pour ne pas paraître méchants. Nous restons positifs, disons oui à tout, pour éviter le conflit », souligne Charles Rojzman, sociothérapeute. Par peur de l’autre. Ou par peur de nous-mêmes, pour ne pas montrer notre part d’ombre, ce dont nous avons honte et que nous redoutons de dévoiler. « Nous croyons que cette fausse gentillesse nous sort de la solitude,mais elle nous empêche d’atteindre le cœur de la relation », reprend-il. Nous ne rencontrons pas l’autre dans sa réalité et sa complexité. Il reste caché par nos fantasmes et nos projections. En étant trop flatteurs ou excessivement dévoués, nous ignorons aussi notre désir au profit de celui de notre partenaire. Cela pourrait sembler généreux s’il ne s’agissait d’obtenir sa reconnaissance, voire son amour. « C’est une séduction pour que personne ne nous abandonne ni ne nous agresse », ajoute Charles Rojzman. Nous y trouvons bien sûr des avantages, notamment un refus de prendre nos responsabilités, puisque nous ne faisons que répondre à la volonté supposée de l’autre. Mais nous prenons aussi d’énormes risques. Celui que notre interlocuteur abuse de notre serviabilité. Ou qu’il nous repousse s’il se sent envahi par notre gentillesse suppliante. Un rejet que nous pouvons vivre comme destructeur. Plus souvent, nous courons surtout le danger répété de nous couper de nous-mêmes, de nos ressentis, de nos besoins. Car la vraie gentillesse ne se trouve pas à l’opposé de la méchanceté, mais là où réside l’affirmation de soi. Savoir dire non, s’opposer, contester, se révolter nous permet en effet de dire pleinement oui, d’être réellement gentils lorsque nous le désirons. Regarder notre ambivalence, lorsque par exemple nous voudrions grogner plutôt que sourire, nous permet d’apprivoiser toutes les facettes de notre personnalité et de choisir la plus adaptée aux enjeux de la relation et du moment. Centrés, sûrs de nous, nous saurons alors être pleinement gentils.
« Ceux qui savent entrer en conflit sans violence n’ont pas besoin de faire semblant d’être gentils, poursuit Charles Rojzman. La juste attitude naît dans un rapport égalitaire et authentique, lorsque nous sommes capables d’afrmer nos besoins tout en écoutant ceux des autres. Elle fleurit dans la confiance, lorsque nous donnons à voir notre être profond, sans peur d’être jugés ou abandonnés. La véritable gentillesse, c’est l’amour de soi et des autres. » Non pas une faiblesse qui soumet à l’autre, plutôt une force qui permet de s’ouvrir à lui. Car la vraie gentillesse engendre la réciprocité. Sauf à avoir en face de soi un pervers patenté, elle dissipe la peur et la méfiance. Parce qu’elle relie à l’autre, elle produit de la bonne humeur et du plaisir à être ensemble. Et elle se transmet facilement, parce qu’il suffit de bénéficier de la gentillesse de quelqu’un pour avoir envie d’en faire preuve à son tour.
Commentaires bienvenus
C'est intéressant ce que tu dis véronique...mais n'y a t il pas souvent une forme de dualité entre ETRE ce que nous sommes au fond et en conscience et le fait de se laisser happer parfois, par nos émotions et notre mental?Le fait de tendre l'autre joue est une image du pardon du mal que l'autre nous fait, et le choix de ne pas rendre la pareille mais au contraire de lui laisser le choix d'abandonner ses représailles en lui montrant le chemin..
Dans ce texte, il est question de la "fausse" gentillesse, s'y reporter...Assez d'exemples pour s'en faire une idée...Et honnêtement s'avouer que nous ne sommes pas, tout le temps, en état de "véritable gentillesse" qui, dans le texte (j'aime m'appuyer sur le texte publié, car, en général, c'est là qu'il y a le propos à "débattre" !)) est"l'amour de soi et des autres", une grande Affaire (A FAIRE) si ce n'est la grande Affaire de nos existences...
La personne gentille n'aime pas ÊTRE. Elle EST !
"Pourtant, la gentillesse est l'expression d'une forme de simplicité, de naïveté qui la place à part et qui justement la démarque..": ces propos me plaisent et définissent bien, pour moi, la vraie gentillesse..qui n'a rien à voir avec des formules toutes faites.
La gentillesse, c'est une qualité d'être, de présence, d'attention à l'autre, aux autres, aux connus comme aux inconnus..et elle se cultive, car, souvent, parfois, la vie nous met en présence de la malveillance et ...il n'est pas facile (difficile) de "tendre la joue gauche" quand on vous a "frappé" la joue droite...
La personne gentille est pour moi un être qui aime la vie, elle aime se faire plaisir en créant des choses belles au quotidien, un sourire, un bouquet ... ces petits choses qui au final vous invite à la paix dans l'instant présent.
Le "faux gentil" est un être qui utilise l'effet "patte blanche" pour arriver à un résultat...La personne gentille, fait en général plaisir avec de petits riens, des choses presque invisibles au premier abord.. Elle aime ETRE. La gentillesse à mauvaise presse, car elle est associé à une certaine niaiserie. On lui préfèrera les mots bienveillance et générosité. Pourtant, la gentillesse est l'expression d'une forme de simplicité, de naiveté qui la place à part et qui justement la démarque..
@ Karen
La fausse gentillesse est justement celle utilisée par les manipulateurs, c'est à dire qu'au lieu de dire fausse gentillesse, il faut dire ruse.
Si je parles souvent de manipulateurs, c'est que malheureusement ils sont nombreux et ce n'est pas toujours facile de les repérer car leur RUSE est au point
La gentillesse c'est aussi accepter l'autre tel qu'il est et admettre ses différences
Tu penses que la gentillesse peut se travailler, moi pas, mais nous pouvons être gentils tous les deux!!!
La gentillesse se cultive, aussi, même si chez l'être humain il y a prédisposition...
Je pense que la gentillesse est un don, nous sommes gentils ou pas.
Les manipulateurs ne sont pas gentils, ils jouent un rôle, je dirais qu'ils sont rusés, pour arriver à leur fin.
Etre gentil comme le dit Aiden, c'est comme aimer, c'est donner sans rien attendre, je donne et peu importe si je ne plais pas, si je ne reçois rien en retour, j'ai donné parce que c'est mon désir, non pour manipuler l'autre, mais tout simplement parce que mon cœur a souhaité faire ce don : matériel, de temps, ou tout simplement de sentiments
Je pense que travailler la sagesse et bien d'autres choses sont possibles mais pour la gentillesse, rien à travailler elle est là ou pas
La gentillesse est spontanée, elle vient du cœur, elle n'a pas peur du jugement d'autrui, elle aime donner :)
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