L’amitié est une des belles réalités de la vie. Que serait la vie humaine s’il n’était pas possible de se lier d’amitié? Autant l’amitié est belle, autant elle peut être source de souffrances. Qui n’a pas été déçu des comportements d’un ami ou de celui qu’il croyait être tel?

Il arrive souvent de se tromper sur la nature du lien. L’un le considère comme son meilleur ami, alors que lui aime sa compagnie, sans plus. Il est possible d’identifier clairement le type de lien qui unit deux personnes et de se servir de critères fiables pour mieux savoir à quoi s’attendre.

Les penseurs des différentes époques parviennent à identifier trois types d’amitié possibles. Pour arriver à comprendre comment ils en arrivent à ce nombre, il faut faire le ménage dans la manière usuelle de classifier les amitiés. Il y a dit-on les amitiés qui naissent des liens du sang : les parents et les enfants, les frères et sœurs, les cousins et cousines, les oncles et tantes etc. Il y a les amis d’enfance, les amitiés qui se sont formées à l’école, les voisins, les membres d’une équipe, d’une organisation quelconque, les camarades de travail. Viennent enfin, ceux que l’on qualifierait de façon spéciale du nom d’amis, qui peuvent être parmi la liste précédente, ou encore provenir de toutes nouvelles rencontres.

Classifier les amis de cette façon ne présente aucun inconvénient pour autant qu’il soit entendu que cela ne renseigne pas clairement sur la nature du lien. Pour identifier clairement le type d’amitié vécu, il faut connaître l’intention principale de ceux qui se lient. Or il n’y a que trois motivations possibles : soit se lier pour l’aide, les services que l’un et l’autre peuvent s’apporter ; soit se fréquenter  pour les plaisirs vécus en commun;  soit enfin, parce qu’on a rencontré l’âme sœur. S’aimer pour l’aide apportée, pour le plaisir partagé, s’aimer pour ce que nous sommes indépendamment des services et des plaisirs qui peuvent en découler. Comment  mettre le doigt sur la nature du lien vécu?  C’est la personne qui s’engage envers l’autre  qui le sait ou du moins peut le savoir. Par contre, comment être sûr des intentions de l’autre?

L’amitié pour mériter ce nom doit être réciproque. C’est ici que la confusion peut intervenir. L’un aime l’autre pour lui-même, le considère comme un autre soi-même alors que lui cherche notre présence principalement pour l’aide apportée. Comment une telle confusion est-elle possible? Il arrive que  la nature de l’aide apportée prête à confusion. Quelqu’un cherche votre présence parce que vous écoutez bien, il se sent en confiance et vous raconte ses problèmes, dévoile des secrets, vous donne accès à son intimité. De vrais amis font cela, mais dans un but différent. Ils s’ouvrent l’un à l’autre dans le but d’instaurer un lien fondé sur la vérité et non sur le mensonge, pour mieux se connaître afin de parvenir à vouloir ce qu’il y de mieux pour l’un et l’autre. Dans l’amitié véritable l’échange va dans les deux sens. Dans le cas cité plus haut vous n’êtes qu’une oreille, elle coûte moins cher que celle du psychologue. L’autre  utilise à ses propres fins vos qualités d’écoute.  Lorsqu’il n’en a plus  besoin, il vous laisse tomber.  A ce moment vous découvrez sa véritable motivation, qu’Il était difficile de percevoir autrement. Une meilleure connaissance des différences entre les trois amitiés aide à devenir plus vigilant.

Chacune des trois sortes d’amitié a raison d’exister. L’homme a tellement de besoins à satisfaire qu’il est normal de faire appel aux autres.  Le plaisir occupe une grande place dans la vie, il est décuplé en le partageant avec d’autres. Enfin, qui ne souhaite aimer et être aimé pour lui-même?

Chacune de ces amitiés peut conduire aux autres formes d’amitié. Souvent des personnes se connaissent d’abord dans un contexte qui se prête à l’échange de services (au travail, à l’école, dans un organisme). Ce premier lien est clairement utile (s’entraider dans les matières scolaires ou pour le travail). Par la suite, tant qu’à  collaborer pourquoi ne pas le faire en s’amusant? Enfin, à force de se connaître, les qualités de chacun deviennent plus évidentes ce qui ouvre la porte à la possibilité de s’aimer pour ce qu’on est.

Une amitié motivée par le plaisir (par exemple, pratiquer un sport ensemble) peut conduire à l’occasion à rendre des services au coéquipier, tout comme ouvrir la porte à l’amitié véritable dans la mesure où le sport permet  à chacun de dévoiler ses qualités. Dans l’amitié utile et de plaisir, il arrive de passer beaucoup de temps ensemble et donc de croire à un lien plus profond. La longueur du temps en commun ne garantit pas pour autant le passage automatique à l’amitié véritable.

Bien que de vrais amis passent bien du temps ensemble, se rendent des services et savent savourer des moments de plaisir, ce n’est pas d’abord pour ces raisons qu’ils sont liés. Ils s’aiment avant tout pour ce qu’ils sont. L’amitié véritable n’est possible qu’entre des êtres matures, responsables, équilibrés et généreux  puisqu’elle implique une totale confiance en l’autre, un désir de vivre dans la vérité et de vouloir fermement le bien de l’autre. Il est évident qu’une amitié tire son nom de la motivation dominante qui unit les deux parties. Voyons quelques différences supplémentaires entre les trois amitiés qui aideront à les départager.

L’amitié utile n’exige pas nécessairement d’avoir des affinités au plan personnel.  Ce qui compte, c’est de satisfaire le besoin. Elle prend fin lorsque le besoin cesse. Il n’est pas non plus nécessaire de bien se connaître. Il y a une sorte d’inégalité dans cette relation puisque l’un donne et l’autre reçoit. L’amitié fondée sur le plaisir exige des affinités et même des habiletés voisines : il n’est pas possible d’avoir du plaisir au tennis avec un partenaire trop faible ou trop fort. Elle implique plus de connaissance de l’autre que l’amitié utile. La recherche du plaisir dénote un certain sens de la gratuité, puisque tout plaisir est recherché pour lui-même indépendamment de ce qu’il rapporte.  En même temps, le plaisir étant personnel, a pour effet de centrer celui qui le recherche sur soi. Les plaisirs étant  par nature changeants, cette amitié risque de cesser lorsque l’attrait pour ce plaisir cesse.

Aimer l’autre pour lui-même suppose de bien se connaître, exige les qualités dont il été question plus haut, elle prend  donc forcément du temps à s’établir. Lorsque le lien est formé, il ne se rompt pas facilement et perdure dans le temps. Si  l’un des deux doit déménager, la force du lien montre que ni l’espace, ni le temps ne saurait avoir raison de lui. Si vous croyez qu’il est possible d’avoir plusieurs vrais amis, une dizaine par exemple, vous comprenez mal ce qu’est la véritable amitié. Si deux amis jugent qu’ils doivent prendre leurs distances,  ils en discutent ouvertement et, après entente, agissent de façon à faire le moins de mal possible à l’autre.

S’il arrive souvent de se tromper sur la nature du lien, il faut d’abord s’en prendre à soi-même. L’amitié véritable requiert une qualité fondamentale : l’humilité. L’humilité consiste à avoir suffisamment confiance en soi pour porter un regard réaliste sur sa personne : sans amoindrir ses qualités, ni gonfler ses défauts. L’orgueil utilise ce stratagème pour se donner le droit de s’apitoyer sur son sort. Même le simple fait de considérer son état actuel  comme étant le résultat du sort, relève d’une autre de ses stratégies. Elle vise à déresponsabiliser le sujet de ce qu’il est devenu, pour l’attribuer à la malchance. Il devient possible alors de se voir comme une victime. L’orgueil provient d’un manque de confiance en soi et, pour cette raison, ne vise pas l’amélioration. On cherche à s’améliorer que si l’on croit pouvoir y parvenir.

La  difficulté de bien se connaître devient un obstacle pour bien connaître les autres. Chacun analyse les comportements des autres à partir de ce qu’il comprend de ses propres agissements. Si on ajoute que toute marque d’amitié quel quelle soit vient flatter le désir d’être aimé. Il est bien compréhensible dans ce contexte qu’une marque d’amitié utile ou de plaisir soit interprétée faussement par le bénéficiaire comme une preuve d’amour authentique à son endroit.

La véritable amitié existe, elle est le cadeau résultant des qualités personnelles dont nous avons parlé (humilité, sens des responsabilités, équilibre personnel, maturité et générosité). Il suffit de s’appliquer à développer ces qualités et cette amitié viendra d’elle-même.

John White

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Commentaire de Romane le 21 octobre 2015 à 6:33

L’amitié vraie ne s’écrit pas
Elle ne se dit pas
Elle ne s’explique pas
Elle ne s’invente pas
Tout simplement,

elle se vit
Pas de mensonge
Pas de secret
Pas de trahison
Juste de la confiance
C’est cela la vraie amitié. ?

Anonyme

Commentaire de Liouba le 20 octobre 2015 à 12:34

Merci de cet article et des commentaires qui effectivement aident à voir plus clair dans son propre positionnement.

Romane, je vous rejoins dans le fait d'imaginer que l'amitié "véritable" peut être un pont vers l'amour et le vivre à deux, cela me semble un chemin naturel et bon, mais il en existe d'autres bien sûr.

Commentaire de Lovyves le 20 octobre 2015 à 11:58

Bonjour à Tou(te)s
Dès que je vois écrit, l'amour inconditionnel, le conditionnel n'est pas loin.
Dès que je vois écrit la vraie amitié, la fausse n'est pas loin.
Et, pour illustrer cette pensée, l'Amie Aiden me semble avoir donné un exemple :
"L'amitié peut cruellement faire souffrir, comme dans l'amour, tout simplement car une "vraie amitié" est de l'amour fraternel.".
Ne serait ce pas ici, la définition du faux amour, de la fausse amitié ?
Là ou il y a souffrance, peut il y avoir amour (l'amitié étant une forme de l'amour) ?

Commentaire de Euquinorev le 20 octobre 2015 à 10:04

L'amitié, comme l'amour, à mon sens ne doit pas être nourrie d'attentes/exigences...Souvent, elle naît presque insidieusement et c'est le temps(la durée) qui lui donne sa vraie couleur.

Comme l'amour, l'amitié est Attention et attentions. En amitié, nous nous comportons comme avec nos "connaissances", sauf que nos ami(e)s n'ont pas (plus) besoin de codes particuliers pour "décrypter" qui nous sommes, nos états d'âme, etc et réciproquement.

Et c'est vrai que ni l'espace ni le temps ne l’altèrent.

Commentaire de AIDEN Trimeau le 20 octobre 2015 à 9:24

Romane. Bien sur, chaque personne apporte son lot d'enrichissement au quotidien sur le forum. Un forum est un lieu de partage ou nous "papillonnons" au gré de nos sensibilités et envies du moment." Pour ce qui est des biais cognitifs de katy," le sujet est très interessant. Elle sait ce que je pense d'elle. C'est une personne "très riche" et vraiment merveilleuse comme beaucoup de personnes ici, seulement pour ressentir de façon régulière le sentiment de paix et d'harmonie, il faut savoir lâcher un petit peu, tout ce qui trop cérébral :) Cela peut s'avérer difficile pour les personnes très intellectuelles. C'est mon point de vue, mais peut--être que je me trompe et que certaines personnes y parviennent.

Nathie, tout à fait d'accord avec toi. Les vrais amis qui tiennent sur la durée et qui acceptent que l'on puisse changer sont rares. Et puis aussi, si l'un devient très positif sur son chemin spirituel alors que l'autre reste comme il est, il y a aussi "les énergies" qui creusent le fossé et le seul l'amour inconditionnel peut faire en sorte, que le lien d'amitié reste.

Serge, intéressant ce que tu dis. Il doit y avoir des exceptions comme le dit Nathie mais je n'en connais pas non plus, lorsqu'il y a eu passion...l'amitié devient impossible.

Commentaire de Romane le 20 octobre 2015 à 4:59

Euquinorev , AIDEN  Trimeau  je vous lis avec beaucoup d'intérêt , vos articles nous enrichissent au quotidien .

Merci . D'autres personnes alimentent aussi différents sujets divers , qui nous ouvrent les voies de l'interrogation, nous obligent à nous positionner, parfois même à faire des recherches personnelles afin d'affuter notre libre arbitre sur telle ou telle question . Par exemple , Katy nous offre un sujet de réflexion , pour moi , assez épineux : '' Les biais cognitifs  '' .Il me faut donc analyser la teneur du sujet avec prudence car il m'ouvre un nouvel horizon à la réflexion. Merci Katy pour tous vos partages . Les commentaires ici sont des sources complémentaires à nous éclairer .

Je reviens à mes moutons :)  La vraie amitié  ; Elle m'émerveille  , me sublime parce qu'elle peut se forger là où on ne l'attendait pas . Pourquoi ? La vraie amitié est pour moi un long voyage à parcourir , au gré des différents paysages à observer. Découvrir l'autre, l'ami(e) futur(e) , il n'y a pas d'obligation puisqu'elle peut rester dans le cadre d'une simple et belle relation. Je trouve une image plaisante à ce sujet , la vraie amitié est comme un bon vin qui se bonifie avec les semaines, les mois , les années afin de trouver sa pleine maturité . ( J'adore le Bourgogne hihi ! le Pomard , un peu cher , dommage  :)   )  La vraie amitié, j'ai presque envie de mettre un A majuscule,   je ne l'ai pas souvent rencontrée . Mon exigence était peut être utopique ,comme le dit si bien AIDEN  trop exclusives, possessives >>  et générait un déséquilibre relationnel . En toute confidence , la vraie amitié était pour moi une longue étape avec l'espoir de trouver un trait d'union naturel à '' une amitié particulière '' qui aurait pu déboucher sur l'Amour , de deux êtres qui ont ouvert  avec bonheur la porte de la connaissance et le partage  de l'un et de l'autre . Je me suis trompée , il m'aurait fallu rester dans ce cadre de la vraie amitié. C'est le cas aujourd'hui . J'étais tellement persuadée qu'elle était le tremplin nécessaire du '' Vivre à deux ''  

Je vous souhaite une douce et paisible nuit . Merci .  

II y a dans la véritable amitié des charmes que l'amour ne saurait nous  offrir >> Simon de Bignicourt

Commentaire de AIDEN Trimeau le 20 octobre 2015 à 0:10

Bonsoir tout le monde.

Romane j'aime beaucoup le choix de tes articles, merci. Puisqu'il est question ici de "vraie" amitié. Je dirais, (en deux mots) l'amitié véritable est une histoire d'amour fraternel de deux êtres qui s'unissent consciemment mais le fait est qu'ils n'ont pas toujours les mêmes attentes.

L'un va, par exemple, attendre que l'autre "devine" ses soucis (un peu comme dans un couple), et l'autre ne va pas toujours y répondre car il aura moins besoin d'une relation "en vase clos", fuira peut-être les amitiés trop exclusives, trop possessives.

Comme dans un couple, il y a souvent une personne qui donne plus que l'autre, et là glouc...frustration. Dans une "vraie" amitié, il y a de façon incontournable, l'expérience enrichissante du don et du pardon.

Dans l'amitié, on expérimente beaucoup le pardon car il n'y aucune autre "réconciliation" possible, comme dans un couple passionné..

Pardon concernant le fait que l'autre n'a pas le temps, est fatigué, n'est pas réceptif, a des soucis autres et cela demande de l'abnégation, du recul et une faculté à pouvoir se mettre à la place de l'autre.

C'est sur la longueur, que l'on peut expérimenter une "vraie" amitié. La capacité à pouvoir être heureux pour l'autre, à rire de ses joies est parfois difficile pour certains, mais aussi à compatir naturellement dans ses peines. 

Il y aussi accepter le fait que l'autre puisse changer, ce qui peut être insupportable pour beaucoup de personnes.

L'amitié peut cruellement faire souffrir, comme dans l'amour, tout simplement car une "vraie amitié" est de l'amour fraternel.

La vraie amitié est inconditionnelle ou elle n'est pas, mais cela se façonne sur la durée, selon ma vision des choses :)

Commentaire de Romane le 19 octobre 2015 à 20:48

Merci Euquinorev , je partage à cet instant ton message auquel je m'associe .

Commentaire de Euquinorev le 19 octobre 2015 à 20:40

"Bien que de vrais amis passent bien du temps ensemble, se rendent des services et savent savourer des moments de plaisir, ce n’est pas d’abord pour ces raisons qu’ils sont liés. Ils s’aiment avant tout pour ce qu’ils sont. L’amitié véritable n’est possible qu’entre des êtres matures, responsables, équilibrés et généreux"

C'est une grande "affaire" que l'amitié, à mon sens aussi nécessaire et vitale que l'amour.

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