La perception du Soi, Râmana Maharshi ( 1879-1950 )

Lorsqu’il réalisa le Soi, Râmana Maharshi était un adolescent de dix-sept ans ; il appartenait à une famille brahmine de classe moyenne de l’Inde du Sud. Il fréquentait encore l’école secondaire, n’avait suivi aucune discipline spirituelle et n’avait rien étudié en matière de doctrine traditionnelle.  


C’était environ six semaines avant que je ne quitte Madura pour de bon que le grand changement survint dans ma vie. Ce fut tout à fait soudain. Je me tenais seul dans une pièce située au premier étage de la maison de mon oncle. J’étais rarement malade, et ce jour-là ma santé n’était pas en cause, mais une soudaine et violente peur de la mort me surpris. Rien dans mon état de santé ne justifiait cela, et je n’essayai pas de le justifier ou de découvrir s’il y avait quelque raison de crainte. Je sentis simplement « je vais mourir » et me mis à penser à ce qu’il fallait faire. Il ne me vint pas à l’esprit de consulter un docteur, mes aînés ou des amis ; je sentais qu’il me fallait résoudre le problème moi-même et sur le champ.
Le choc produit par la peur de la mort conduisit mon esprit vers l’intérieur et je me dis à moi-même mentalement, sans vraiment donner forme aux mots : « Maintenant la mort est venue ; que signifie-t-elle ? Qu’est-ce qui meurt ? C’est ce corps qui meurt. » Et aussitôt j’interprétais intimement la scène de la mort. Je m’étendis, les membres allongés, aussi raide que si la rigidité de la mort était survenue et j’imitai un cadavre de façon à donner une plus grande réalité à la rechercher. Je retins mon souffle et gardai les lèvres étroitement closes afin qu’aucun son ne puisse s’échapper, afin que ni le mot “Je” ni aucun autre ne puisse être articulé. « Eh bien ! maintenant, me dis-je, ce corps est mort. Tout rigide, il va être porté au bûcher et là brûlé et réduit en cendres. Mais suis-je mort avec la mort de ce corps ? Le corps est-il “Je” ? Il est silencieux et inerte mais je sens toute la force de ma personnalité et même la voix du “Je” en moi, qui s’en distingue. Donc je suis Esprit transcendant le corps. Le corps meurt mais l’Esprit qui le transcende ne peut être atteint par la mort. Cela signifie que je suis l’Esprit qui ne meurt pas ».
Tout ceci n’était pas une vague pensée, mais jaillissait de moi avec une intensité en tant que vérité vivante que je percevais directement, presque sans aucune intervention de la pensée. “Je” était quelque chose de très réel, la seule chose réelle dans mon état présent, et toute l’activité consciente liée à mon corps était centrée sur ce “Je”. A partir de ce moment le “Je” ou Soi concentra son attention sur lui-même par une puissante fascination. La peur de la mort s’était évanouie une fois pour toutes. Dès lors l’absorption dans le Soi continua, sans interruption. D’autres pensées pouvaient aller et venir comme les différentes notes de musique, mais le “Je” continuait comme la note fondamentale shruti qui est sous-jacente et se mêle à toutes les autres notes. Que le corps s’adonnât à la parole, à la lecture, ou à quoi que ce soit, j’étais toujours centré sur “Je”. Avant cette crise, je n’avais pas de perception claire de mon Soi et je n’étais pas consciemment attiré par lui. Je ne ressentais pas d’intérêt perceptible ou direct pour lui, moins encore quelque inclination à m’y établir.


 Râmana Maharshi, Œuvres réunies, Éd. Traditionnelles, 1979.

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