Nouvelles de l’après-perquisition - 25/9/2010par Alain ChevillatDiverses questions reviennent régulièrement dans nos correspondances et je voudrais
répondre ici à trois d’entre elles.
1- Où en êtes-vous de vos ennuis ? Ont-ils des conséquences sur vos activités et sur
l’avenir de Terre du Ciel ?
Les gendarmes poursuivent leur enquête : envois de questionnaire aux intervenants,
interrogations du personnel, du curé de Louhans (4h !). Une visite à l’Inspection du travail
s’est révélée sans fruit : « secret de l’enquête ». On attend la suite.
La « garde » de tous nos ordinateurs pendant un mois ne nous a pas permis de faire notre
brochure d’été habituelle. Nous avons fait une brochure réduite qui renvoyait sur internet.
Cela a conduit à un résultat en baisse de quelques 30%. Comme nous avions fait un bon hiver
je pense que l’un compensera l’autre, et que le bilan sera équilibré. Du moins, je l’espère.
Cet été, les banques se sont liguées contre nous – alors que nous n’avons jamais eu le moindre
incident bancaire. Une première nous a refusé l’ouverture d’un compte ; une seconde Le
Crédit Coopératif de Melun nous a fermé d’autorité notre compte Nef. Puis une troisième,
une banque de Louhans, nous a demandé de fermer notre compte, avant de changer d’avis
après discussion avec le responsable régional. Tracfin, un organisme d’État chargé de la lutte
contre le blanchiment d’argent, serait derrière ces décisions. Mais on ne voit pas de quel
blanchiment il s’agirait, la Brigade Financière et le Fisc ayant déjà épluché tous nos comptes
sans rien trouver, et on peut se demander : « Qui est derrière Tracfin ? »
Rappelons que le Centre Amma a vu, il y a plusieurs années, une ouverture de compte refusée
par toutes les banques, et que les Témoins de Jehovah, victimes de la même discrimination,
portent aujourd’hui cette question devant les tribunaux. N’y aurait-il pas des listes noires qui
circulent ? N’auraient-elles pas un lien avec le référentiel de la Milivudes qui pointe du doigt
600 structures « à tendance sectaire » à l’intention des « autorités » ?
L’existence de listes noires secrètes rappelle un passé pas si lointain… et pas très glorieux, et
invite à nous demander si nous sommes toujours dans un pays de droit.
Nous avons dépensé beaucoup d’énergie à essayer de savoir ce qu’on nous reproche et ce
qu’il faut modifier pour être « bien dans les clous ». C’est très délicat car nous sommes, en
vérité, « une entreprise à but non lucratif », ce qui n’existe pas dans les textes français. Nous
sommes entre deux mondes : l’entreprise et l’association, une forme d’entreprise sociale ! On
a envisagé beaucoup de scénarios d’ajustement, mais, finalement, on attend le verdict pour
modifier certaines choses.
On a pu lancer correctement la rentrée, mais là, il semble que ce soit la récession qui nous
rattrape car les inscriptions sont plus faibles que d’habitude.
Cette crise nous a remotivé, a réveillé notre énergie combattive, avec le sentiment que nous ne
combattons pas seulement pour nous, mais pour toute la mouvance alternative, pour l’avenir
de la société. En fait on se bat pour la Vie, contre l’intégrisme de la Miviludes, et contre une
bureaucratie qui peut être très castratrice.
Terre du Ciel –
www.terre-du-ciel.fr2
Le code du travail a été conçu pour protéger le faible contre les abus du fort – ce qui est très
bien – mais sa complexité aujourd’hui, et l’importance quasi exclusive donnée à la forme sur
le fond, joint à une mentalité fondamentalement répressive envers les « patrons », font qu’on
peut souvent le voir, hélas, comme un enchevêtrement de barbelés qui emprisonne la vie.
Mais il faut essayer de faire avec !
Terre du Ciel continue son chemin avec une détermination ravivée. Nous serons dans une
quatrième site en été 2011.
2- Comment comprenez-vous que Terre du Ciel, pluridisciplinaire, interculturel et
inter-religieux, qui assume un véritable travail culturel de service public, puisse être
dans le collimateur des pouvoirs publics ?
Le spirituel n’a pas droit d’expression en France dans la sphère publique. Or depuis vingt ans,
nous ne respectons pas cette omerta tacite, cette loi du silence.
Tous nos Forums, notamment, mettent en avant la spiritualité en explicitant qu’elle est une
dimension fondamentale de la vie. Nous renouvelons aujourd’hui plus que jamais cette
affirmation, notamment dans ces Forums de trois jours qui accueillent à chaque fois un millier
de personnes et une quarantaine d’intervenants venant de tous horizons professionnels,
sociaux et religieux.
Les 22 Forums organisés à ce jour n’ont jamais été soutenus par aucun pouvoir public, aucun
média, aucune fondation, aucune religion reconnue. Mais leur succès se confirme année après
année, et gagne chaque année un panel plus large d’intervenants. Car ils « éblouissent » ceux
qui y participent. Vous comprenez que cela ne peut pas plaire aux pouvoirs publics.
Par ailleurs, depuis quelques années, la Miviludes, en chasse des minorités spirituelles, a
élargi sa cible aux médecines naturelles, aux écoles parallèles, au développement personnel.
C’est une véritable inquisition contre le « non conforme », une mission de normalisation de la
pensée et des comportements. C’est tout l’art de vivre alternatif qui est officiellement visé –
comme dangereux pour la religion officielle de la République française qui est le
« Consumérisme ». Et Terre du Ciel est clairement au coeur de cette démarche pour
l’élaboration d’un nouvel art de vivre.
Au lieu de prendre acte du côté obsolète de beaucoup d’aspects de la société française
actuelle, et de soutenir les structures alternatives comme laboratoires de recherche et
d’expérimentation pour une société post-industrielle dans laquelle nous entrons, les pouvoirs
publics ont choisi de durcir leur position et de s’engager dans la voie de la répression. Et leurs
outils pour cela sont la Miviludes et les administrations.
Les pouvoirs publics disent aujourd’hui à qui veut les entendre que la perquisition du 7
janvier n’a été due qu’à des fautes administratives. Mais un policier très haut placé à Paris
nous a dit, après enquête, il y a peu : « La 1ère piste est aujourd’hui complètement
abandonnée. Ils sont sur une piste financière banale. Ils en veulent à la Miviludes qui les a
égarés. Ils cherchent à botter en touche ». C’est très clair, et cela résume toutes les
informations que nous avons réunies par ailleurs.
Un exemple : l’acte d’accusation officiel premier viendrait de l’Inspection du travail :
« Activités dissimulées ». Cela, parce que notre Kbis n’avait pas été mis à jour et ne
mentionnait que notre activité première, l’édition. Alors, bien sûr, que tout le monde, y
compris l’Inspection du travail venue nous visiter 4 ou 5 ans plus tôt, connaît parfaitement
notre activité de stages, explicitée sur notre site internet et sur nos brochures largement
diffusées, et commentée par maints articles de journaux. N’aurait-il pas été plus simple de
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nous envoyer un courrier amical : « J’attire votre attention sur le fait que votre Kbis n’est pas
à jour, et .... » Une relation vraiment « d’information » - comme elle prétend en avoir – de
l’Inspection du travail l’aurait conduite aussi à nous dire : « Il vous faut aussi changer votre
code Naf, et compte tenu de vos activités culturelles devenues prépondérantes je vous
conseille de demander à l’Insee le code..., qui vous permettra par ailleurs de travailler le
dimanche, ce qui, je sais, est important pour vous. »
Voilà, comment on peut concevoir un véritable service public. Au lieu de cela on envoie des
gendarmes en mitraillette, et on accuse : « Vous n’êtes pas en règle ! ». L’administration
nous considère, à priori, comme « des méchants » qui cherchent à tricher et profiter, au lieu de
voir qu’on fait ce qu’on peut, mais que c’est difficile et qu’elle peut nous aider.
Tout le personnel a été traumatisé, s’est vécu comme l’ennemi public n° 1, alors qu’il vit
d’ordinaire dans la conscience d’oeuvrer au bien commun.
Il est bien connu que les règlementations administratives françaises sont particulièrement
compliquées, et un petit patron de PME n’est pas forcément au courant de toutes leurs
subtilités, qui d’ailleurs changent tout le temps. Il est donc très vulnérable. Selon qu’il se situe
d’un côté ou de l’autre de la barrière, selon qu’il est plutôt proche du « premier cercle » du
Président, ou des cibles de la Miviludes, l’administration agira d’une façon ou d’une autre.
Elle enverra une lettre d’invitation à corriger les erreurs, ou une escouade de gendarmes qui
saisiront l’argent et les ordinateurs, tuant, de fait, une entreprise avant qu’elle soit jugée*.
Rappelons que nous n’avons récupéré nos ordinateurs qu’après 4 semaines et sur la pression
de nos amis qui se sont démenés pour obtenir notre survie (1500 lettres ! Merci). Nous
n’avons toujours pas récupéré l’argent.
Quoi que disent aujourd’hui l’administration, les gendarmes, l’inspection du travail ou le
procureur, c’est un fait incontestable que la méthode employée nous aurait tué sans
jugement s’il n’y avait pas eu la réaction forte de nos amis. Doit-on répéter en choeur la
phrase bien connue : « J’ai confiance dans la justice de mon pays » ?
* Ce processus est bien connu. Il a été appliqué avec succès à d’autres structures. Voir les films du
CICNS et leurs dossiers – et notamment le film joint à la revue Sources n°25.
3- A quelle Tradition spirituelle Terre du Ciel se rattache-t-il ? S’il n’y en a aucune, estce
un espace New Age ?
C’est une bonne question, à laquelle on peut apporter des réponses à plusieurs niveaux :
1- Au premier niveau les « espaces » de Terre du Ciel (Chardenoux, Chaumont, Pierre
Chatel et bientôt Consolation) sont des espaces laïcs, mais de laïcité positive. C’est à
dire que les lieux ne sont rattachés à aucune tradition particulière, mais peuvent être
ouverts occasionnellement à chacune. Les lieux ne sont ni chrétiens, ni bouddhiste,
mais peuvent le devenir temporairement le temps d’un stage ou d’une rencontre. Ce
n’est pas une laïcité d’exclusion du spirituel, mais d’accueil dans la neutralité de
toutes les spiritualités. C’est ce qu’est, selon nous, la véritable laïcité.
2- A un deuxième niveau, il est relativement connu que les fondateurs de Terre du Ciel
sont reliés à l’Inde, et il y a un subtil parfum de l‘Inde dans les lieux de Terre du Ciel,
particulièrement à Chardenoux . Même si l’appartenance est très « discrète », pour ne
pas dire « secrète », elle exhale son parfum et marque l’esprit des lieux, elle teinte les
valeurs et les comportements. C’est pourquoi certaines personnes, très sensibles,
ressentiront que Terre du Ciel est une structure reliée à l’Inde.
3- Au niveau le plus profond Terre du Ciel, depuis le début de son existence, est
l’émanation du désir de « Faire savoir que Cela existe. » - j’en ai souvent parlé. Ce
« Cela » s’insère dans quelque chose au-delà de la tradition, ce que l’Inde appelle le
« Sanatana Dharma ». Cette expression, qui date de quelques millénaires, peut être
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traduite par « la Loi éternelle », c’est à dire la loi valable en tout lieu et tout temps, la
loi principielle qui régit la vie sous toutes ses formes et dans toutes ses dimensions,
depuis toujours et jusqu’à la fin des temps. L’Occident a développé la connaissance
des lois de la matière. L’Inde a été beaucoup plus loin dans la connaissance des lois
qui régissent tous les plans de la vie, visibles et surtout invisibles.
La tradition spirituelle de l’Inde n’a pas de fondateur, et son livre de références, « Le Veda »,
est une compilation de textes venant d’une multitude d’auteurs inconnus, mais extrêmement
cohérents. La spiritualité de l’Inde est donc le fruit d’une sagesse collective, d’un mouvement
collectif de recherche de la « Vérité », d’une « Vérité absolue », par delà tous les
conditionnements circonstanciels. Cette recherche s’est faite par la méditation, selon des
processus explicités dans les Ecritures et enseignés, par une méthode « objective »,
« scientifique ». Le fruit de cette recherche est le « Sanatana Dharma », la « loi éternelle »
dont les traditions sont des formes particulières.
Dans la vie spirituelle concrète des individus, cette « loi éternelle » s’exprime, selon l’époque
et le lieu, sous diverses conceptualisations et avec une diversité de pratiques, et cela donne les
grandes religions : christianisme, soufisme, bouddhisme... C’est pour cela qu’on observe en
Inde, à l’intérieur même de l’hindouisme, une multiplicité de « dieux » et de pratiques
religieuses, qui sont autant de « voies d’accès » de « portes d’entrée » particulières, toutes
reconnues et acceptées comme pouvant conduire à une expérience spirituelle qui
fondamentalement est « une ». C’est pour cela, aussi, que l’Inde a été de tout temps un pays
refuge pour les religions persécutées. Elle les reconnaît toutes comme « siennes ».
Terre du Ciel se distingue radicalement du New Age en ce que, s’il partage avec lui la vision
de l’unité transcendante des religions, il considère comme essentielle la nécessité d’en choisir
une, alors que le New Age, syncrétiste, surfe sur l’ensemble des diverses traditions en
refusant tout engagement spécifique.
Les grands invités de Terre du Ciel sont pratiquement tous insérés dans une tradition,
expression elle-même du Sanatana Dharma, et ils enseignent la Voie de leur tradition.
Terre du Ciel, reste, lui, dans la contemplation et valorisation du Sanatana Dharma lui même.
C’est ce qui lui donne sa spécificité de structure spirituelle parfaitement inter-religieuse où,
comme l’a exprimé un jour Philippe Maillard devant le millier de participants d’un Forum :
« Artisans de paix, je pense que c'est un peu l'objectif de Terre du Ciel... parce qu'on y
rencontre des gens qui appartiennent à des traditions différentes, et qui ne sont pas là pour
s'opposer ni même pour essayer intellectuellement de trouver des voies de rapprochement.
Mais pour mettre en commun ce Souffle qui les habite les uns et les autres. »
Terre du Ciel est un espace de laïcité positive, porté par l’Esprit bien présent dans
chacun de ses sites.
http://www.terre-du-ciel.fr/telechargements/Nouvelles_TdC_25sept10.pdf
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