1— Maitrî, qui peut se traduire par bonté aimante, bienveillance. La bonté aimante n’est pas seulement la volonté de rendre une personne heureuse, d’offrir de la joie à cette personne aimée. C’est la capacité d’offrir de la joie, du bonheur, à la personne que vous aimez ; car même si vous avez l’intention de l’aimer, votre amour peut faire souffrir cette personne.
Il faut de l’entraînement pour pouvoir aimer correctement ; et pour pouvoir offrir du bonheur, de la joie, vous devez pratiquer le regard profond dirigé vers cette personne-là. Parce que si l’on ne comprend pas la personne, on ne peut pas l’aimer correctement. La compréhension est l’essence de l’amour. Si l’on ne peut pas comprendre, on ne peut pas aimer. Tel est le message du Bouddha. Si le mari, par exemple, ne comprend pas les difficultés les plus profondes de sa femme, son aspiration la plus profonde, s’il ne comprend pas sa souffrance, il ne pourra pas l’aimer comme il faut. Sans compréhension, l’amour n’est pas une chose possible.
Comment faire pour comprendre une personne ? Il faut avoir du temps, il faut pratiquer le regard profond dirigé vers cette personne. Il faut être là, attentif, il faut observer, il faut regarder. Et le fruit de ce regard profond s’appelle la compréhension. L’amour est une chose véritable s’il est fait d’une substance appelée compréhension.
2— La deuxième composante de l’amour véritable est la compassion : karunâ. Ce n’est pas seulement la volonté de soulager la douleur chez une autre personne, mais la capacité de le faire. Il faut pratiquer le regard profond pour bien comprendre la nature de la souffrance de cette personne, afin de pouvoir l’aider à se transformer. La connaissance, la compréhension sont toujours à la base de la pratique. La pratique de la compréhension, c’est la pratique de la méditation. Méditer, c’est regarder profondément dans le cœur des choses.
3— La troisième composante de l’amour véritable, c’est la joie : muditâ. S’il n’y a pas de joie dans l’amour, il ne s’agit pas d’amour véritable. Si l’on souffre tout le temps, si l’on pleure tout le temps et si l’on fait pleurer celui ou celle que l’on aime, ce n’est pas véritablement de l’amour, c’est même son opposé. Si dans votre amour il n’y a pas de joie, vous pouvez être certain qu’il ne s’agit pas d’amour véritable.
4— La quatrième composante est upékshâ, l’équanimité, ou bien encore la liberté. Dans l’amour véritable, on obtient la liberté. Quand on aime, on offre la liberté à celui ou à celle qu’on aime. Dans le cas contraire ce n’est pas de l’amour véritable. Il faut aimer de telle sorte que la personne aimée se sente libre, non seulement autour d’elle mais aussi à l’intérieur. « Chéri(e), as-tu assez d’espace dans ton cœur et autour de toi ? » Voilà une question intelligente pour vérifier si votre amour est une chose véritable.
* Vivre en plein conscience - paix et joie dans les tribulations de la vie - Ed Terre du Ciel - 1997 * Merveilleux petit ouvrage de Thich Nhat Hanh, le vénérable moine bouddhiste vietnamien.
Source : L’hibiscus
Commentaires bienvenus
"L'amour véritable", ... il me semble que même si l'on peut trouver des pistes ou des points communs dans les histoires d'amour, chaque amour est unique, un mélange mesuré de chaque personnalité pour construire cette 3ème personne. Un mélange de ces composantes et de tant d'autres choses...
L'humain naît de l'amour, il grandit et s'élève par l'amour, mais de quel amour s'agit-il, car on utilise ici le même mot pour des choses qui n'ont pas précisément la même signification? L'état amoureux, celui qui nous pousse à crier "je t'aime" se distingue clairement de l'attachement profond qu'un parent ressent pour son enfant, pourtant les mots exprimés sont les mêmes. Dans l'amitié l'expression de l'amour se dissimule dans les gestes et les intentions, car la pudeur tient encore en otage les mots directs que deux amis aimeraient se dire; heureusement que les choses évoluent... L'amour semble donc revêtir plusieurs visages, dans les religions on parle d'amour du prochain, de compassion, de don de soi par amour, etc.; dans le monde professionnel on parle d'amour du travail bien fait, de passions, lorsqu'il s'agit de s'adonner à des activités qui nous accaparent mystérieusement, et que dire de l'amour inconditionnel des animaux de compagnie tels que les chiens? Il semble que les lois de la nature imprègnent le vivant d'un lien affectif puissant entre géniteur et progéniture. Tous les êtres vivants ne dépendent pas de cet attachement (comme beaucoup de poissons ou de bactéries) pour assurer la pérennité de leur espèce, mais à un certain stade d'évolution cela semble généralisé. Sans vouloir creuser la question dans tous les sens, j'aimerais ici focaliser sur l'amour que nous connaissons entre humains, essayer de dégager l'amour dit "véritable" du "passionnel" car j'ai le sentiment que beaucoup d'entre-nous n'ont pas fait cette distinction et que, par conséquent, nos choix de vie vont trop souvent contre le mur, avec toutes les déceptions, déchirements et blessures qu'il nous faut soigner et surpasser pour continuer de vivre.
Sommes-nous capables d'amour véritable? Comprenons-nous l'authentique essence de ce qu'est l'amour, dans sa pulsion première et dans sa durée? La passion, telle qu'exprimée dans le récit de Roméo et Juliette, n'est-elle pas le piège assurant la pérennité de notre espèce, comme l'est le rut pour les animaux? Quel formidable cadeau que la conscience pour réfléchir sur ces questions, quel extraordinaire chemin que celui de l'erreur pour évoluer dans les méandres de l'amour!
Pour commencer la quête il me semble essentiel de définir clairement les différences entre l'amour-passion et l'amour véritable, car en fin de compte, selon les enseignements de ma propre vie, c'est toujours l'amour véritable qui l'emporte sur la durée.
L'amour-passion est celui du fameux coup de foudre, l'expression émotionnelle d'un désir soudain, basé sur une rencontre, souvent ancré sur une plastique, sur une énergie parfois incompréhensible, qui induisent un pouvoir d'attraction quasi-irrésistible sur deux êtres. L'humain devient capable de tout, contre toute morale et code de conduite, il peut mettre en oeuvre n'importe quel dessein allant dans le sens de l'accomplissement de la jouissance de la passion qui l'envahit. L'amour-passion s'installe dans l'être de manière monolithique et ravage son esprit, il occupe son attention et le pousse à fomenter ses décisions et ses actes dans un seul but, celui de "l'unicité sacrée" avec l'objet de son désir. Quelle extraordinaire singularité! Quand on sait que l'esprit et sa formidable puissance seraient capables de contrôler de telles pulsions, il s'avère en définitive que l'amour-passion dominerait entièrement sa "victime"? S'enchaînent alors les mécanismes purement émotionnels qui dictent, par la succession de pulsions, un chemin de conduites irrationnelles en quête de fusions physiques et spirituelles. Je ne saurais dire si cette étincelle initiatrice doit inspirer la méfiance, car en vérité elle porte en elle une essence sacrée, une forme de cadeau de la Création dont on ne saurait se moquer, puis se distancer, il me semble primordial toutefois d'y ajouter un soupçon de responsabilité afin de ne pas se brûler les ailes. L'humain a tendance à subir l'état amoureux, il se dit victime de coup de foudre et se réfugie dans la conformation de sa victimisation. L'amour-passion naît d'une voix, d'un regard, d'une plastique, d'une odeur ou encore d'une simple couleur de peau ou de cheveux. Parce que l'état amoureux accapare l'esprit, l'humain préfère la plupart du temps subir cet état, alors qu'il est parfaitement en position de contrôler ses propres pensées, toujours! Il va de soi que l'état amoureux est une énergie gigantesque, mais il n'excuse aucune irresponsabilité en vérité, il suffit de garder le contrôle sur ses pensées, tout le monde en est capable... C'est donc nous-mêmes qui décidons de l'aveuglement engendré par l'amour-passion, c'est nous qui baissons les bras quand cela nous arrange, c'est nous qui commettons parfois les pires actes irresponsables en mettant la faute sur l'état amoureux. L'amour-passion n'excuse rien, même s'il semble très puissant, il ne l'est jamais plus que notre esprit et que notre capacité de contrôler nos pensées.
L'amour véritable se définit comme la prise de conscience d'une unicité authentique, elle se situe dans un plan universel, où chaque chose, chaque être vivant, chaque élément de l'univers est une partie de soi et inversement. Il faut avoir, selon moi, atteint un certain degré cognitif afin de comprendre l'existence de l'amour véritable, et de l'assimiler comme un élément essentiel de sa propre vie. Pour exemples antagonistes je prendrais le cas de deux mères: la première, extrêmement prudente avec son enfant, lui interdit de faire mille choses de peur qu'il ne se blesse, continuellement aux petits soins, elle fait tout pour le bien-être de son enfant; la deuxième est plus permissive, elle regarde son enfant traverser la vie sans trop intervenir et fait confiance au destin pour que l'enfant apprenne par ses expériences. Toutes deux aiment leur enfant, d'un amour profond, c'est évident. Mais la première subit encore l'amour-passion, alors que la deuxième vit un amour véritable. L'amour-passion enferme l'être dans la possession, la peur et la jalousie, alors que l'amour véritable l'ouvre sur le don, l'acceptation et la confiance. Pourtant on parle d'amour, c'est le même mot, et la portée est tellement différente! L'humanité se tromperait-elle depuis toujours, en appellant amour ce qui ne l'est pas? Et nous tombons presque tous dans un piège dont il faut nous sortir pour grandir, pour devenir véritablement meilleurs... Combien de couples ne se remettent pas de la fin de l'amour-passion? Dans nos contrées développées on a passé la barre des 50% de divorces et séparations, et ce chiffre continuera d'empirer si l'humanité ne se prépare pas à évoluer en conscience pour assumer pleinement ce qu'est l'amour véritable. Accepter l'autre comme il est vraiment représente l'exercice le plus difficile imposé au couple, croire que l'on va changer l'autre banalise le chemin le plus commun, beaucoup trop de gens se font prendre dans ce piège et vivent des années d'illusions avant de peut-être se réveiller un jour.
Alors comment faire quand on rentre dans les méandres de la vie conjugale "courtoise" où la libido a disparu, où les projets communs ont laissé place aux priorités égoïstes de chacun, où l'érosion du temps a enlevé de part et d'autre la couche de sédiment malléable que l'amour-passion entretenait encore? Dans l'idéal je dirais que réapprendre à connaître l'autre semble une bonne voie de départ, mais il faut pour cela se connaître bien soi-même. Emprunter un chemin introspectif afin d'identifier avec raison et recul ce qui doit et ce qui ne doit pas être dans son quotidien, apprendre à vivre sans l'illusion de changer l'autre, savoir l'accepter et à l'assumer tel qu'il est, apprendre à trouver ensemble des jardins de partage et à respecter d'autres plus secrets, voilà des voies à explorer qui font sens à mes yeux. Ce sont là de bien jolis concepts, de bien belles phrases, mais la réalité impose trop souvent que les deux partenaires ne soient pas en phase dans le même rythme d'évolution. Si l'un des deux ne fait aucun effort pour envisager sainement l'évolution personnelle nécessaire au passage de l'amour-passion à l'amour véritable, alors le déséquilibre s'installe et finit par faire exploser le couple. Je dirais qu'un dialogue de fond est nécessaire pour mettre des mots sur ce que l'on traverse, que ces mots soient formulés, parce qu'il est possible que l'autre les comprenne...
Lancer le moteur de l'amour véritable ouvre la voie de la deuxième vie, celle de la richesse de l'un et de l'autre, où le sexe n'occupe plus cette place si importante. L'introspection dont il est question plus haut demande à l'être d'accepter ce qu'il est lui-même, d'assumer avec responsabilité et clairvoyance l'amour véritable qu'il doit se porter à lui-même avant de devenir capable de l'offrir à l'autre. Est-il possible d'aimer en vérité si l'on ne s'aime pas soi-même? L'amour-passion ressemble à une offrande de la Création, un joyau unique et sans mesure qui nous transporte dans un voyage à la fois somptueux et ravageur, mais conjugué avec un ego mal connu et incontrôlable, l'amour-passion peut prendre les pires visages, aller jusqu'au meurtre...
C'est encore et toujours ce fameux ego qu'il faut connaître et identifier dans nos processus de perception et de réaction. Etrangement je constate que les gens capables de vivre l'amour véritable ont réussi à dompter leur ego, ils le connaissent bien et n'en sont plus esclaves, comme je constate que les ravages de l'amour-passion prennent trop souvent racine dans les heurts et les fiertés de l'ego incontrôlé. Ce que l'amour-passion donne à vivre n'est-il pas une épreuve nécessaire au chemin de l'éveil et de la reconnaissance et de l'amour véritable? Ne croyant plus au hasard je me réjouis aujourd'hui de constater que le sentier des erreurs m'ait permis de faire la lumière sur le plus beau visage de l'amour, celui de l'amour véritable, où chaque chose, chaque atome, chaque être vivant, l'univers dans son entier fusionnent avec mon être, rien ne m'appartient dans le fond, et tout m'appartient en quelque sorte. Aimer sans besoin de posséder, aimer sans avoir à s'imposer, aimer dans la continuité et sans retenue, aimer sans étouffer, aimer dans le respect, aimer en vérité c'est exister pleinement.
Orlandres
Même si je ne suis pas un adapte du bouddhisme je retrouve une grande part de vérité dans ces quatre composantes
Merci pour ce rappel
Bonsoir Karen :)
D | L | M | M | J | V | S |
---|---|---|---|---|---|---|
1 | 2 | |||||
3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 |
10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 |
17 | 18 | 19 | 20 | 21 | 22 | 23 |
24 | 25 | 26 | 27 | 28 | 29 | 30 |
Pour ajouter un commentaire, vous devez être membre de ‘épanews’.
Rejoindre épanews (c'est gratuit)