Pourquoi y a t'il quelque chose plutôt que rien ?

Une réponse poétique...parmi d'autres...

"À l’ombre d’arbres purs de toute vie encor,
las de sa ronde identité, l’Absolu rêve de se faire
quelque chose comme épaisseur, multitude, se donner corps
loin des silences innommés qu’éternellement Il profère.
Il se voudrait, au fond de la coïncidence, différent.
La plénitude pleure en Lui de n’être pas plus évasive…

Alors, son Unité s’oublie et d’elle-même se déprend.
Il entend sourdre l’univers parmi la transparence oisive ;
il y suscite des saisons et des soleils en majesté.
Danseur agile, un mouvement agite ses bras dans l’argile :
tout ce qui n’était pas s’étonne d’exister.

L’Illimité ne se veut plus qu’humble lisière, aile fragile,
se vêt de la tunique d’or des fins et des commencements,
s’efforce à l’éphémère, n’ose dépasser le bois d’érables,
s’arrête source et se blottit derrière les bruissements
du maitre-espace tout pétri d’impondérables.

Toutes les créatures tendent leur essor vers leur destin.
L’Un démembré jette son âme, ivre, au nombre qui la dépèce,
se laisse devenir milliers du fond de son centre indistinct,
se distribue à l’univers en son essence et son espèce.
Mais tant d’êtres !… L’Être éclaté s’y voit et ne s’y connaît plus.
Parmi les mondes dévalant du cœur d’une multiple amande,
l’Absolu, dispersé, se cherche et se parcourt et se demande
comme, étant autre que Lui-même, Il reste toujours l’Absolu."

Jean Biès, Les pourpres de l'Esprit

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Commentaire de Lovyves le 7 décembre 2016 à 18:47

L'humain à horreur du vide.
Horreur des non réponses aux questions existentielles.
Alors, il comble son ignorance de différentes manières (religions, Dieu) et poèmes pour d'autres.
C'est rassurant.

Nous existons, l'univers existe; l'univers à t'il des limites?
Déjà si l'univers n'a pas de limites, c'est au-delà des capacités de notre cerveau.
Alors pourquoi existe t'il la vie, l'univers, au lieu de rien ?
Là c'est le grand vertige …
La contemplation est, possiblement, l'antidote.

Commentaire de Albatros le 29 novembre 2016 à 10:50

Très beau poème qui m’inspire beaucoup, d’un Absolu qui s’ennuie avec Lui-même, un Absolu qui semble complétement dépassé par sa création, il est perplexe et ne sait plus que faire.
 
Merci à la poésie d’ouvrir ainsi des espaces inattendus, entre vérité et doute.

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