LE MONDE DE MABA

Baat

Je suis une melissaï... je suis Baat fille de Maba, j'ai traversé les temps, j'ai parcouru les mondes... comme toi...
Et maintenant que je reviens je me souviens... comme toi...
C'est une longue histoire...
Dans les temps de l'éternité, je vivais dans les basses terres...
Au coeur du delta dans la Demeure de l'abeille...
Le monde de Maba...
Maba... la mère... l'esprit du miel
Mère issue des origines, acceptant le voyage sans possible retour...
Celle qui conduit les âmes vers le fleuve...
Fluide électrique, rapide, léger ...
Qui propage... de l'ordre... de l'harmonie
En envoyant ses filles...
Paillettes d'or de l'unicité originelle...
Elle offre au monde ce regard-là...
Son souffle de douceur porteur de vérité...
Et filles de Maba comme toi...
Gardiennes des mémoires comme toi

Au temps des naissances, les femmes sont allées dans la forêt... dans une clairière autour d'une petite étendue d'eau... disposer... les ruches sauvages harmonieusement, au coeur des troncs d'arbres, les femmes ont posé alors des voiles rouges afin de prévenir les abeilles...

Dans le monde d'où je viens...
Dans la pierre... le savoir
Au moyen de la voix ...
La vibration particulière...
Idéogrammes de sons...
Les images se déroulent
Reconnaître alors ...
La vérité des choses dans les temps infinis de la nature éternelle...

Et il y a eu fusion...
Et il y a eu mariage avec les filles de la terre...
Et celles qui ont gardé comme une mémoire oubliée, la trace des origines...
Un rêve, une ébauche... une réalité...
Celles-là aujourd'hui se souviennent... de leur éternité comme toi...
Elles sont le souffle de la vie
Elles sont l'âme du monde
Elles sont femmes de la terre
Elles sont mères,
Elles sont filles,
Elles sont soeurs
Elles sont... amantes
Elles sont...
Bafouées... cloîtrées... étouffées...
Elles n'ont rien
Elles possèdent tout...

Alors regarde...
Imagine
Ma soeur
Ma mie
Mon coeur...
Ces milliards de souffles
Portés dans un même élan
Vers le ciel
Et qui s'unissant
S'entremêlant
Comme une note sifflante
Comme un trait, une flèche
Fendre l'air
Et dissiper l'ombre
Elles sont venues pour ça
Tu es venue pour ça...

Souviens toi...
Souviens toi...

Ton âme va se confronter à ta réalité
Tu aimeras...
Tu souffriras...
Tu te sentiras perdue
Tu penseras avoir totalement perdu le sens
De ton orientation...
De ta propagation vers la lumière
En cela réside ton défi...


Tout s'est passé comme cela devait...
Rien a changé...
Les étoiles doubles éclairent le chemin... mais tu le savais déjà...
Laisses-toi pénétrer par la lumière
Tu l'as appelée... tout est en toi...
Il y a eu cela...
L'impulsion d'amour
Tu es une abeille...
Tu es une reine...

Tu as l'éternité pour toi
Le miel coule en toi
Comme dans une terre promise...

Avant notre monde, existaient d’autres mondes... et encore... et encore...
Alors n'oublie pas
Tu viens de là comme moi...
Le chant des femmes est une vibration...
Les sons émis par le choeur qu'elles forment s'infiltrent dans le coeur de chacune
Et diffusent tout l'amour contenu dans ce monde

Mais sur le chemin...
Tu apprendras ce qu'il y a de sauvage en toi
La rivière sous la rivière...
Celle qui sait, la femme sauvage... la louve...
Déterminer en toi ce qui doit vivre ou mourir

Et tout est arrivé...
Laisse toi porter par l'esprit du miel, il est légèreté
Il est ce qui donne la quiétude ...
Tu viens de là comme moi...
Souviens toi...
Dans ce territoire en toi plus vieux que tous les océans ...
Souviens toi... mon amour... souviens toi...

Souffle d'amour...

Celle qui sait....

Souviens toi...

... mon âme

Sinon qui peut me croire...

Toutes ces voix m'envahissent... je suis au coeur du dédale
Souffles rythmés comme un coeur qui s'emballe
Souverain absolu... tyrannique
Qui m'absorbe tout entière...
Cri rauque
Battements des tempes
Battements d’ailes
Frôlements d'elles
Les sons s'envolent... voix de la tradition
Exaltation qui monte vers le ciel
Verticalité du souffle
Oppression qui étreint
Joie pure...
La voix se cogne... mon coeur en écho s'emballe...
Partage avec moi ce moment...
Mon coeur bat si fort...
Fugacité de la pensée...
Sans soupçon de l'abîme dans lequel cet amour me plonge
Je dépose les armes aux creux de tes mains...
Les voix... toutes ces voix qui emplissent l'espace...
Bouleversent mon âme qui bat à tout rompre...
Encore et toujours depuis ce jour...
Et cela me mène vers toi... qui ne veux rien de moi
Je voudrais partager cet instant... je voudrais t'appeler... maintenant
Mettre à ton oreille ce mouvement
Cette incantation...
Tradition déchirée qui s'exhale ici
Et je retiens ma main..

Tu entends mon chant...
Tu entends ma voix...
Qui vient vers toi...
Maba offrait le miel... offrait le souffle
Son regard touchait au plus profond...
Le son des mots était inutile
Pour les filles de Maba...
Le miel comme une lave dorée
Coulait de leurs lèvres comme une vérité... si douce...
Seul le bourdonnement des étoiles...
Guidait leurs pas dans une harmonie parfaite
Commençait alors le chemin...
Et chacune vers le soleil... longeant la mer jusqu'au temps de la lune
Attendaient pieds léchés par les vagues
Gardant dans leur âme
Le souvenir des caresses...
... des baisers échangés
Si doux... si purs...
Perles de plaisir naissant
Tant d'amour... oh oui tant d'amour
Au creux des alvéoles
Mais il fallait partir accepter... le voyage... si long
Douloureuse .... la séparation si douloureuse
Pour la première fois .... oui la première fois
Sentir les larmes... brûlantes du sel qui purifie
Un bonheur... intense .... pourtant
Un espoir immense... comme une fulgurance
Qu'au-delà du temps de la mémoire... de l'espace... des univers
Quelque chose... oui quelque chose
Dans les regards voilés.... dans l'ombre
Pour un instant... pour un moment... pour une éternité
Elles se trouveraient...
Souviens toi....
Parties...
Sous le chant des baleines...
Arrivées sous le chant des louves
Sous la lune, je t'ai cherché mon amour...
J'ai parcouru la terre... j'ai sillonné la mer...
Le voyage au creux du coeur de la baleine...
Me donne le sens..

Elle est la mère... elle est la terre

Elle seule... connaît le chemin de la ténèbre ...

Elle seule... peut résoudre l'énigme...

Elle seule habilite le passage...

Je t'ai cherchée...

Je te cherche encore... et encore

Entrevue tant de fois perdue si vite

Fugitive... océane...

Offre nous... la vie mon amour

Renaît à toi-même...

Offre nous ton vivant...

Oh oui mon âme fait ce don...

Pour t'aimer .... encore

Pour te retrouver... encore et encore

Pour ne plus jamais te perdre...

J'ai accepté l'offrande...

Et tout a été mêlé...
Baat sentait.... entrer en elle toutes les connaissances...

... antérieures à toute la création
Le flot était si dense
Qu'elle ferma les yeux...
A-Mor... vivre l'absence de mort...
Tu sauras mon amour
Tu sauras...
Baat avait fait le vide en elle,

Jeté le super flux, le superficiel, le superlatif...

Et elle plongea au fond de son âme

Pour retrouver le flot, celui de la connaissance,

De la tradition, de l’éternel...

C’était un voyage difficile,

Douloureux, au bord des cicatrices,

Au bord des frontières de la mort...

Mais il le fallait…



Mon amour, ouvre toi...

Écoute toi,

Reconnais toi,

Aime toi...

Tu marches,

La terre, te porte
Et tes yeux voient...
Oui il le fallait...
Et au-delà des cicatrices... au-delà des supplices
Comme une grâce comme un don
Un amour offert... pour rien... pour tout
... qui ne demande rien
Tu es sur le chemin...
Tes yeux voient maintenant
Ils savent...
Ils n'ont jamais cessé d'y croire n'est-ce pas?
Comme moi...
Merci de t'être rappelée
Merci de m'avoir crue
Ne pas oublier te portera
Ouvre ton cœur... encore et encore

... oui .... Baat était partie... avec, ancrée au plus profond d'elle, dans ses gènes l'inscription de la vibration... celle apprise par Maba celle qui disait au milieu du livre et au centre de ses paroles... une phrase...
"Et de ta propre extermination tu vivras".
Alors pour calmer son chagrin elle se mit à peindre...
Et plus les temps avançaient et plus elle se souvenait... de son choix...
Consenti... pour tout...
Elle avait bu le miel comme un fleuve doré... elle avait fusionné... accepté
Maba disait
"Tu dois songer que dans la plus dense des douleurs est contenu le germe du plus grand des bonheurs...
C'est ce qui lui donna la force d'aller vers Terra...
Il fallait consigner, traduire le chemin, pour la mémoire....
Juste cela... pour parer à l'oubli
Les lettres magiques avaient installé leur rythme

Et elles tournaient et tournaient encore comme les derviches

Installant dans leur course ce désir de comprendre de savoir...

Baat avait alors demandé aux lettres ce que voulait son âme et les lettres avaient répondu T_H_M
Où le signe des signes... symbole de toute perfection
Développe l'idée de tout ce qui est
Universellement vrai
Universellement approuvé
Image accomplie de l'âme...
Alors écrire comme coule le ruisseau
Que l'eau ruisselle et lave toutes les infractuosités
Territoires caverneux où la lumière même ne pénètre
Guide moi... guide ma main Maba... Mère... Mer intérieure
Tout est inscrit... tatouage moléculaire`
Aller jusqu'à ce vide où seul réside la vibration
Accepter que chaque mort à soi-même est un commencement
Et répandre la saveur de la lumière
Et sonder le passé pour comprendre et préparer l'avenir
Et témoigner pour dire que c'est arrivé... vraiment...
Et les lettres tournaient et tournaient encore
Elles lui prenaient la main...
Maba Mère esprit
Mère bleue du monde perdu
Mère noire de la terre
Mère blanche du dévoilement...
feu qui purifie
Monde de l'Esprit
Baat allait vers Cnossos
Rendez-vous des mélissai
Terre des Amazones
Asylia le refuge
Trois colombes... trois... au sommet de la montagne sacrée
Et dans le ventre de la montagne
Les premières-nées...
Ne peuvent être séparées...
Le temps et l'éternité...
Le hasard et la grâce...
C'est la seule chose qu'il reste pour nous retrouver...