Alors qu’on estimait jusqu’ici que le virus se propageait avant tout via de grosses gouttelettes éjectées par la toux, les éternuements ou les postillons, de nouvelles études suggèrent qu’il voyagerait aussi via l’air et les fameux aérosols, ces nuages de gouttelettes microscopiques – mille fois plus petites que les postillons – parfaitement invisibles à l’œil nu.
Aucun des travaux dont il est ici question n’en apporte une preuve définitive. Mais tous semblent «confirmer l’hypothèse de l’aérosolisation du virus lors de la respiration», rapporte le magazine Science en citant une lettre rédigée par Harvey Fineberg, membre de l’Académie nationale des sciences américaine et adressée à Kelvin Droegemeier, responsable du Bureau de la politique scientifique et technologique à la Maison-Blanche. Du très officiel donc, et peut-être de quoi amener à revoir les conseils prodigués à la population.
Si elle venait à être corroborée, cette hypothèse des aérosols changerait la donne. Les grosses gouttelettes ne voyagent pas très loin, en général à moins de deux mètres d’une personne malade, puis elles retombent par gravité. Deux voies d’infection sont dès lors possibles: lorsque ces postillons sont directement inhalés, ou bien lorsqu’ils contaminent des surfaces qui sont ensuite touchées par des doigts qui iront immanquablement sur la bouche, le nez ou les yeux. Dans les deux cas, la distanciation sociale et l’hygiène des mains, mantras répétés depuis le début de l’épidémie, suffisent à minimiser les risques.
Mais si le virus est capable de flotter dans l’air pendant plusieurs heures, protégé par de minuscules gouttelettes comme une étude récente du New England Journal of Medicine l’a suggéré, alors se prémunir serait autrement plus délicat.
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Une autre étude mentionnée dans la lettre va dans ce sens. Menée par une équipe du Centre médical de l’Université du Nebraska, elle met en évidence la présence ubiquitaire d’ARN viral dans les chambres destinées aux patients positifs: dans les toilettes, sur les rebords des fenêtres en passant par les cadres des lits, environ 75% des surfaces testées étaient positives à l’ARN viral. Même constat dans des échantillons d’air, y compris à plus de deux mètres des patients. De quoi amener les auteurs à évoquer une possible transmission par les aérosols, même si dans cette expérience, les scientifiques n’ont pas trouvé d’éléments infectieux à proprement parler, le virus étant en quantité a priori insuffisante.
D’autres travaux apparaissant dans cette lettre évoquent enfin les équipements de protection dont sont vêtus les personnels soignants (blouses, surblouses, charlottes, etc.) comme sources potentielles de transmission. Menés par une équipe de l’Université de Wuhan, ils suggèrent que le fait d’ôter ces vêtements semblerait resuspendre le coronavirus dans l’air. Précision importante: ces deux dernières études sont en attente de validation et donc de publication. La prudence est donc de rigueur.
Mis bout à bout, tous ces éléments commencent à constituer un faisceau de preuves tendant vers une possible contamination par les aérosols, estime l’académie américaine. Cela pourrait en outre expliquer la propagation si foudroyante du SARS-CoV-2. Et également donner de la voix aux partisans du port généralisé du masque chirurgical dans les lieux publics, ce qui empêcherait les porteurs asymptomatiques de former d’hypothétiques nuages infectieux.
«Les masques doivent jouer un rôle, sans doute plus grand qu'auparavant pensé, mais attention de ne pas tomber dans l'excès inverse en voyant du virus dans tout l’air qu’on respire», tempère Serge Kouzan, pneumologue au Centre hospitalier Métropole Savoie à Chambéry.
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L’Organisation mondiale de la santé (OMS) va dans le même sens et a répété le 27 mars que la transmission par les aérosols ne survenait que dans des cas très précis, par exemple lors de l’intubation de patients dans un état critique.
Sources : Le Temps
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