« Or, l’idée d’un dieu-un installé à l’extérieur du monde est une idée toute récente, je vous le répète; trois mille cinq cent années, pas plus. Comment se fait-il donc que cette aberration ait connu un si grand succès parmi vous? » - Les mémoires de Zeus, Maurice Druon

 
Le monothéisme a remplacé le polythéisme depuis que la heurette s’est fait belle. Toujours la même danse, toujours les mêmes pas. Du poly au mono, du mono au poly et ainsi de suite. Défendre envers et contre tous une croyance au prix de la vie des autres et de la sienne propre, un programme qui perdure. Mais pourquoi donc l’idée d’un Dieu quelconque dans la vie des humains s’avère-t-il si important pour eux? Qu’ont-ils à gagner pour vouloir absolument adhérer à des croyances qui excluent, bafouent, torturent et tuent ceux qui ne partagent pas leurs points de vue divins?

C’est forcément que l’au-delà dont ils fantasment dépasse tout ce que leur imagination leur permet de vivre ici-bas. Ah mais oui, c’est sécurisant. Quelque chose d’indéterminé, de plus grand que soi et à qui l’on peut remettre son destin sans en être responsable. Un vrai miracle. Les athées, eux, opteront pour des termes new age à la mode; l’univers, la vie, la source, la cocréation. Les autres se fieront au hasard, aux probabilités, aux circonstances, à la providence, à la chance, à la fatalité.


 
Nous serions, en grande partie, dans l’âge des ténèbres depuis toujours, dans un obscurantisme tellement bien établit qu’en sortir n’apparaît pas du tout envisageable. Pire, nous l’entretenons à grands coups de rejet et d’ignorance volontaire. L’argent, le sexe comme tabou ne sont rien en comparaison de la recherche de notre véritable identité. L’interdiction de se poser des questions sur sa propre nature est grandiose. Elle outrepasse tous les domaines qui nous sont donnés d’expérimenter. Chaque apprentissage, chaque épreuve retourne constamment dans une logique cul-de-sac, celle de remettre entre les mains de quelqu’un ou de quelque chose d’autre la décision de son commencement et de sa fin. Conditionné à avoir peur de tout et de rien, l’être humain a fini par renier son libre-arbitre. Il exhorte des autorités extérieures à lui-même à le reconnaître comme entité libre, autonome et indépendant.

Le lointain, l’inaccessible, l’impensable, attraction qui favorise l’élaboration de croyances, de futilités, qui permet surtout de s’y attacher comme à des piliers indéracinables, figés de vérités dans le temps. Pourquoi est-ce si difficile d’envisager son existence personnelle à partir de soi uniquement comme créateur de sa vie? Au lieu d’encenser une force externe, inconnue et de la concevoir omnipotente, omnisciente, omniprésente, infinie, illimitée, éternelle, qu’est-ce qui nous empêche de nous attribuer ces qualités? Ce n’est pourtant pas compliqué. Nous n’avons qu’à faire un copier/coller de tout ce que nous projetons en dehors de nous-mêmes et de le ramener à soi. Cette idée de constamment vouloir diviniser notre univers où tout est beau, harmonieux, féerique mais dont cette sublime création relèverait d’un inatteignable pouvoir occulte.


 
D’un côté nous nous glorifions de notre notoriété, de nos bons coups, de notre richesse et tutti quanti et de l’autre nous fulminons contre la malchance, le mauvais sort, les aléas de la vie, du fait d’être victime. Nous acceptons que notre volonté ait pu nous créer des situations remarquables d’avancement, de dépassement en même temps que nous refusons de reconnaître que l’adversité, les tribulations et la souffrance ne dépendent pas de nous. Prompte à inventer nombres de théories, l’humanité se gargarise de spécialistes pour en débattre. Par manque de convictions profondes nous continuons à nous nourrir de mensonges et de peurs. Or, la peur (de soi), tout comme l’amour (de soi), est la même et unique énergie créatrice aux pôles inversés. Que nous baignions dans l’un ou l’autre de ces états, nous finissons par concrétiser ce qui nous habite. Peu de gens soulignent cet aspect.
 
De plus, considérant que rien ne peut exister en dehors de notre conscience, comment ne pas voir que ce qui se manifeste dans nos vies dépend nécessairement de la conscience que nous avons de nous-mêmes! Nous ne pouvons pas poursuivre un idéal de paix et de joie sur cette planète en niant que nous sommes seul responsable et garant de notre incarnation. La peur de soi c’est ne pas admettre notre inconditionnalité, notre potentiel infini. C‘est tromper à nos cellules en les programmant dans l’illusion que l’évolution se fait dans la menace. C’est demeurer dans le triangle infernal de la souffrance de victime-bourreau-sauveur.
 
L’amour de soi est une reconnaissance de sa créativité illimitée. Elle n’a rien à voir avec l’égoïsme ou le narcissisme. Puisque nous sommes ceux qui créons notre environnement, notre univers, qu’aurions-nous à craindre de ce que nous mettons en place pour évoluer? Rien n’existe en dehors de soi. Tout est à l’intérieur. Mais par refus de le reconnaître, nous acceptons de le projeter à l’extérieur, assis aux premières loges, nous en contemplons le film se déroulant sur le grand écran de notre conscience, tels des spectateurs ébahis d’un grandiose chef d’œuvre. Le formidable de cette intégration dépasse toutes les notions de pouvoir, d’obéissance, d’autorité et de soumission à quiconque. La pyramide hiérarchique s’effondre et chacun se retrouve à se prendre en main définitivement. Au moment où la pyramide s’effondre, ce que nous avions placé au sommet prend place à nos côtés. Tout le monde devient égal à l’image d’un cercle qui n’a ni haut ni bas, aucun niveau de supériorité.


 
Du coup, quelles sont les conséquences de vivre ainsi? Elles sont énormes, incommensurables puisqu’il n’y a plus de garanties ni d’assurance que ce que nous connaissions continuera de se répéter. Cela signifie la disparition, à jamais, de tous les faux systèmes de protection de justice, de médecine, de manque d’argent, de reconnaissance par les autres, etc. La résistance à ces changements se fera par la volonté de ne pas perdre ces acquis illusoires en insistant pour défendre sa position dans la société, son job, sa vision étroite de «prêcher pour sa paroisse», de préférer le connu déchirant à l’inconnu aux multiples possibilités. Se savoir créateur de sa propre vie dans l’acceptation sincère et non dans la résignation nous oblige, que dis-je, nous condamne, par le libre-arbitre, à ce seul choix, tôt ou tard. Ressentir que nous pouvons et devrons un jour vivre sans menace, sans ennemis est certainement l’une des plus grandes peurs qui nous paralyse dans nos habitudes de subordination à autrui plutôt qu’à soi-même. C’est qu’elle assure au moins une chose dont nous ne voulons pas douter et remettre en cause; la conviction que la mort est une délivrance.

Patrice Berthiaume ÉDITIONS 180 DEGRÉS

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