Atlantico : La paralysie du sommeil est un phénomène aussi fréquent qu'effrayant pour le dormeur. Pouvez-vous nous décrire en quoi cela consiste et si cette paralysie est dangereuse ?
Joëlle Adrien : Non, ce n'est pas dangereux, cela consiste à se réveiller d'un sommeil et ne plus pouvoir bouger, d'avoir la sensation d'être paralysé. On continue à respirer, il y a donc des mouvements du corps, mais les mouvements volontaires sont impossibles. C'est donc très angoissant et parfois associé à des hallucinations, on croit être agressé ou qu'il y a quelqu'un dans la pièce.
Cela augmente l'angoisse de ces épisodes : d'une part celle de rester paralysé toute sa vie, d'autre part celle des hallucinations.
Au moment où survient cette paralysie du sommeil, le dormeur est-il éveillé ou encore endormi ? Ou peut-être un peu des deux ?
Le cerveau est éveillé mais le corps est encore endormi, il se trouve toujours dans la phase appelée "sommeil paradoxal" dans laquelle il n'ya plus du tout de tonus musculaire. C'est un éveil incomplet, cette paralysie arrive très fréquemment au moment du réveil, beaucoup moins lors de l'endormissement. Il y a une espèce de dissociation entre le cerveau et le corps.
Le sommeil et le réveil font jouer un très grand nombre de mécanismes qui doivent être coordonnés. Parfois cette coordination ne fonctionne pas bien, cela peut être du à un stress, à un manque de sommeil, des horaires irréguliers, à beaucoup de facteurs comportementaux. Dans des rares cas cela est du à une vraie maladie : la narcolepsie, mais elle est extrêmement rare, touchant peut-être trois personnes sur mille. Dans l'immense majorité des cas ce n'est pas grave, mais du à une mauvaise hygiène de vie, au stress, qui fait que le cerveau se réveille avant le corps.
Les patients confrontés à cette paralysie décrivent souvent la même sensation : celle d'une présence malveillante tout près d'eux, dans la pièce, qui les regarde. D'où vient la récurrence de ce schéma hallucinatoire ?
Au moment de la paralysie, on est en train de se réveiller du sommeil paradoxal, dans ce sommeil il y a des hallucinations car il y a des rêves par exemple, des phénomènes de respiration irrégulière ou haletante tout à fait normaux dans cette phase. Au moment de cet éveil incomplet persistent toute la partie hallucinatoire faisant partie du rêve, mais aussi ces respirations parfois oppressée. Quand le cerveau s'éveille on perçoit toujours cela car le corps est dans un état de rêve, cela suscite l'angoisse, on se demande ce qui se passe, si ça va s'arrêter. Tout cela augmente l'angoisse. Si l'on comprend que cela n'est pas grave, que l'on comprend que c'est une paralysie du sommeil, tout devient beaucoup moins angoissant.
Beaucoup de personnes ayant vécu cette expérience ont eu l'impression que la présence malveillante était assise sur eux ou leur écrasait la poitrine. D'où vient cette sensation d'étouffement ?
Cela vient de phénomènes naturels. Pendant le sommeil paradoxal il y a l'activation de ce qu'on appelle le système neurovégétatif qui régule la respiration, le rythme cardiaque, la sudation, et tout un tas de phénomènes végétatifs, c'est-à-dire sur lesquels on n'a pas de contrôle volontaire. Or, pendant cette phase, ce système est extrêmement bousculé, on s'en rend pas compte dans les rêves, mais quand on le vit de façon éveillée, on en prend conscience.
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